Višegrad refuse d'admettre un passé macabre Plus
d'une décade après la guerre, peu d'habitants serbes sont prêts à
affronter les horreurs qui ont été perpétrées sur les lieux. Par Rachel Irwin et Edina Becirevic à VišegradQuand
on lui a demandé si elle était consciente de ce qui se passait à
Višegrad durant la guerre, le visage de la serveuse s'est rapidement
renfrogné.
Elle ne sait rien, a-t-elle dit, tout en croisant ses
bras et en jetant des regards nerveux à travers le café de l'hôtel,
vide et sombre. Elle ne vivait pas ici à l'époque, a-t-elle dit.
Cela semble être un refrain partagé dans cette ville de la Bosnie orientale.
Nichée
dans les montagnes et pouvant s'enorgueillir d'un pont en pierre
ottoman, remontant au 16e siècle, qui enjambe majestueusement le fleuve
de la Drina aux couleurs émeraudes, Višegrad pourrait difficilement
être plus pittoresque.
Mais les beautés naturelles de la ville
et de ses alentours démentent les horreurs qui se sont abattues sur la
région au cours de l'été 1992, lorsque des paramilitaires serbes de
Bosnie menèrent une violente campagne afin de débarrasser la région des
Musulmans de Bosnie - les Bosniaques.
Cet été-là, comme nombre
de témoins l'ont rapporté durant les procès au Tribunal de La Haye, le
pont historique inscrit au patrimoine de l'UNESCO fut le théâtre
d'exécutions d'hommes, de femmes et d'enfants bosniaques, dont les
corps furent jetés dans le fleuve, souvent en plein jour. Avant que ne
survienne l'automne, 3.000 bosniaques allaient être tués. Et beaucoup
disparaître de manière plus simple.
Les cousins Milan et Sredoje
Lukić qui font actuellement l'objet d'un procès au Tribunal de La Haye
[1], , sont accusés de porter la responsabilité pour une multitude
d'exactions commises à l'époque.
Ces hommes, qui clament leur
innocence, sont accusés d'avoir brûlé vif 140 hommes, femmes et enfants
dans des maisons ayant été barricadées.
Un compère de Milan
Lukić, Mitar Vasiljević, a été condamné par le tribunal à 20 ans
d'emprisonnement en 2002 pour s'être fait le complice du meurtre de
sept bosniaques à Višegrad.
Dans leur décision sur l'affaire Vasiljević, les juges du tribunal ont écrit que Višegrad avait été soumise "
à l'une des campagnes les plus vaste et brutale de nettoyage ethnique dans le conflit bosniaque".
Ils ont ajouté que, proportionnellement, aucune autre ville de Bosnie,
hormis Srebrenica, n'avait subi un changement plus drastique dans sa
composition ethnique.
Avant la guerre, 60% des 20.000 habitants
de Višegrad étaient des Bosniaques. Aujourd'hui, seule une poignée de
survivants sont retournés dans ce qui est une ville à prédominance
serbe.
Les tueries à Višegrad sont également reprises dans le
premier chef d'accusation pour génocide qui pèse sur l'ex-président des
Serbes de Bosnie, Radovan Karadžić, lequel a été arrêté en juillet
après 13 ans de cavale.
L'Hôtel où convergent les accusations de sévices
L'hôtel doublé d'une station thermale Vilina Vlas, là où la serveuse a tiqué face
aux questions, est à un saut en voiture du centre-ville et il est
entouré de bois et d'un ravin escarpé tout de pierres. La page internet
de l'hôtel vante les vertus curatives des eaux thermales et se targue
d'une vaste salle de restaurant idéale pour les diners d'affaires.
Partant
de cette douce description, personne ne soupçonnerait que Vilina Vlas
ait pu servir à des desseins bien plus sinistres durant la guerre.
Selon le mémoire préalable du procureur dans l'affaire Lukić, Vilina Vlas "
aurait
servi à Milan Lukić et à ses paramilitaires pour détenir et interroger
des civils musulmans bosniaques de sexe masculin ainsi que pour violer
et asservir sexuellement des jeunes femmes musulmanes et des jeunes
filles".
Ces événements à l'hôtel, et les allégations de
viols, n'ont pas été repris dans l'acte final d'accusation dressé à
l'encontre de Lukić. La présomption d'innocence liée à ces allégations
doit par conséquent prévaloir.
Cependant, il existe un ensemble
épais de compte-rendus qui suggèrent que quelque chose d'effroyable
s'est déroulé au Vilina Vlas. Les sévices présumés - qui ont été
rapportés dès 1992 par les Nations Unies, Amnesty International et des
journalistes étrangers - étaient d'une gravité telle que certaines
femmes auraient mis fin à leurs jours - dit-on - en se défenestrant du
second ou du troisième étage. On prétend que des centaines d'autres ont
été maintenues des jours et des semaines durant dans les chambres
d'hôtes, où elles auraient été brutalement violées, mutilées et souvent
tuées.
Dans l'une des nombreuses déclarations recueillies par le
Research and Documentation Centre (RDC), à Sarajevo, une femme bosniaque parle de ses épreuves à l'hôtel avec les Serbes qui l'y avait amenée.
"
Il m'a violée de 12h00 à 21h00 ce jour-là. Tout ce temps, il a tenu un couteau en main, ou à sa portée", dit-elle.
Les rares rescapés ont refusé d'être interviewés pour cet article, évoquant le traumatisme à raconter à nouveau leur histoire.
Ces
jours-ci, Vilina Vlas s'occupe de visiteurs âgés qui viennent se
baigner dans les eaux médicinales. A l'intérieur de l'hôtel, de lourds
rideaux sont tirés sur la plupart des fenêtres et l'air est chargé par
la fumée des cigarettes. Le mobilier dans le hall et le coin café sont
d'un rouge foncé, mais amplement usés et défraîchis par les années.
La
serveuse d'âge mûr, clairement mal à l'aise face aux questions portant
sur le passé de l'hôtel, bat en retraite en traînant les pieds au
travers de la salle de restaurant et elle descend les escaliers en
direction du hall. Plus tard elle réapparaît avec un homme élancé qui
s'assied et observe pendant quelques minutes les seuls clients du café.
Il sera suivi par un homme plus corpulent, qui agit de même.
Toutes
les tentatives d'interviewer le personnel au Vilina Vlas connaissent la
même issue - ils disent ne rien savoir sur ce qui s'est passé durant la
guerre.
Il n'y a rien qui indique que le personnel actuel ait
travaillé au Vilina Vlas au début des années 90. Toutefois, nous leur
avons parlé parce que comme tout autre habitant de cette petite ville,
il est raisonnable de penser qu'ils aient certains souvenirs sur son
passé récent, et - tant qu'à y travailler - qu'ils soient au fait de
certains récits qui planent plus particulièrement sur l'hôtel.
"
Višegrad est une petite ville. Ils ne peuvent pas ne pas savoir", a lâché Mirsada Tabaković, une Bosniaque qui s'est enfuie de Višegrad en juin 1992. Elle a accompagné les journalistes de l'
IWPR à Vilina Vlas, et a assisté aux rencontres avec le personnel de l'hôtel.
Tabaković
vit maintenant à Sarajevo, où elle vient en aide aux victimes de viol
et prête main forte pour recueillir des déclarations auprès de ceux
ayant survécu aux sévices présumés au Vilina Vlas.
"
Elles sont toutes dans un état terrible", a-t-elle dit. "
Elles
souffrent de dépression et de trouble de stress post-traumatique. La
plupart d'entre elles ne sont pas en mesure de vivre une vie normale."
Et Tabaković a subi le même traumatisme.
Le
19 mai 1992 - le jour où l'Armée Yougoslave se retirait de Bosnie - des
soldats à l'accent serbe sont apparus sur le pas de sa porte, a-t-elle
dit, et ont amené son mari, son beau-frère et son beau-père ; la
dernière fois où elle les a vu vivants.
Tabaković a écarté ses
mèches blondes de son visage et promené son regard sur la salle de
restaurant - sur la serveuse au visage de marbre retranchée derrière le
bar avec la machine expresso, sur les deux managers traînaillant à
fumer des cigarettes, sur les clients âgés grimpant les escaliers en
survêtement, et sur le gâteau à moitié entamé dans le frigo ronronnant
du café.
"
Comment est-ce que ces gens peuvent faire comme s'il n'y avait rien eu ?", demanda-t-elle incrédule.
Prendre
un café dans un endroit comme le Vilina Vlas était proprement un
tourment pour Tabaković, et elle s'agitait sur sa chaise en touchant à
peine à son café.
"
J'ai regardé ces murs en pensant au nombre d'histoires de souffrance jamais contées dont ils garderont le secret", a-t-elle observé plus tard. "
Nous
avons entendu bien des choses sur ce qui s'est passé au Vilina Vlas,
mais il y en a tant dont nous n'entendrons rien, en particulier parce
qu'ils ont décidé de ne pas inclure le viol dans l'acte d'accusation
dressé contre [Milan]
Lukić."
Comme
l'IWPR l'a signalé en juillet, l'échec à poursuivre Milan Lukić au
motif de viol a provoqué la rage et la stupéfaction parmi les victimes
et les ONG.
Le procureur en chef Carla Del Ponte a omis
d'inclure ces charges dans son acte d'accusation de manière à accélérer
le procès, étant donné que le tribunal se voit contraint de boucler
tous les dossiers d'ici fin 2009.
Del Ponte s'est retirée à la
fin de l'année 2007, mais le bureau du procureur a attendu jusqu'en
juin dernier - juste un mois avant que ne débute le procès - pour
soumettre à nouveau le chef d'accusation. Les juges l'ont pris en
considération trop tard et le procès a débuté sans que les charges n'en
fassent partie.
Nous ne savons rien
Dans
un local exigu non chauffé au centre de Višegrad, plusieurs membres du
Parti social-démocrate indépendant (SNSD), un parti de droite, se
serraient autour d'une longue table. Ils étaient avides de parler des
problèmes économiques qui affectent la ville et des plans pour créer
des opportunités d'embauche et des attractions touristiques.
"
Nous comptons énormément sur le tourisme", déclara Brane Topalović, un des chefs du SNSD, au gabarit petit et les cheveux grisonnants. "
Nous
avons une station thermale, Vilina Vlas. Nous comptons agrandir ses
capacités, et il existe des plans pour construire un autre hôtel ainsi
qu'une piscine".
Questionné, il a prétendu ne pas être au
courant de viols et de meurtres qui se seraient produits durant le
conflit au Vilina Vlas, propriété de l'Etat.
"
Ecoutez, je ne sais pas, même aujourd'hui, ce qui s'est passé à Višegrad", a-t-il dit, tout en soulignant qu'il ne s'est installé dans la ville qu'en 1996. "J
e ne sais que ce que les gens m'ont dit".
Ce qui signifie ?
"
Certains racontent une chose, d'autres disent quelque chose d'entièrement différent",
a-t-il dit, semblant visiblement de plus en plus agité. Il a ajouté
qu'il ne suit pas les procès au Tribunal de La Haye, il avait néanmoins
rencontré Milan Lukić en 1996.
"[Milan]
était un bel homme", a-t-il dit. "
Il n'avait pas de problèmes avec l'application de la loi à l'époque."
Un
autre membre du SNSD, un homme âgé en veste bleue, hoche de la tête en
signe d'approbation avant de se lancer dans un discours sur les "
Extrémistes musulmans" qui selon lui ont commencé le conflit.
"
Selon la propagande, 3.000 musulmans ont été tués ici", a-t-il poursuivi. "
Je garantis qu'il s'agit d'un mensonge. Ce qui s'est passé ici est une guerre civile."
Au
fil des conversations qui s'enchaînaient, une réalité a fait surface :
personne ne savait ce qui s'était passé durant l'été 1992, car ils
prétendaient avoir vécu ailleurs, ou avoir déjà quitté la région. Ils
ont dit qu'ils n'avaient pas vu de meurtres de leurs propres yeux, et
par conséquent ils prenaient les récits sur les atrocités à Višegrad
pour des rumeurs et rien d'autre.
Pensent-ils que les déclarations sur ce qui s'est produit au Vilina Vlas ne sont que des rumeurs ?
"
Je ne sais pas", a répondu Topalović, le chef de parti.
A
ce moment-là, un homme d'âge mûr assis tranquillement à l'arrière du
local s'interposa. Il semblait mal à l'aise avec certaines des
affirmations de ses amis et tenta de les expliquer.
Čedomir
Gužina a grandi à Sarajevo et il a combattu dans l'Armée des Serbes de
Bosnie durant les 44 mois que dura le siège de Sarajevo. Une fois la
guerre finie, il est venu à Višegrad et a passé les quatre années
suivantes au Vilina Vlas avec d'autres Serbes qui avaient quitté leurs
villes d'origine.
"
Personne n'a jamais mentionné les crimes dont parlent maintenant les gens", a dit Gužina. "
J'ai
entendu des gens en parler seulement après que Milan Lukić eut quitté
la ville, après qu'un mandat eut été délivré pour l'arrêter. Peut-être
que les gens qui étaient avec lui en savent plus long, mais personne ne
parle de cela et nous ne savons rien."
Darko Andrić, un
homme de grande taille avec un pull blanc, se tenait assis en écoutant
les propos de Gužina. Au moment de la guerre il était enfant et il a
dit que ses parents avaient quitté Višegrad au cours du printemps 1992.
"
Même si quelque chose a dû se produire ici, personne n'est au courant", a-t-il déclaré. "
C'est pourquoi il est stupide de répondre à vos questions. J'ai entendu dire qu'il y avait une sorte d'hôpital là-bas [au Vilina Vlas]
durant
la guerre. Ils disent que l'eau a des pouvoirs de guérison. Les blessés
étaient là-bas et les médecins prenaient soin d'eux... des centaines de
personnes ont été sauvées. Qui sait combien d'amputations ont eu lieu
là-bas ?"
Selon les spécialistes, ce genre de déni est
très répandu - et même prévisible - après que des atrocités ont été
commises sur des populations civiles.
"
Parce
que vous ressentez une culpabilité sur ce que votre groupe à fait à cet
autre groupe, vous échouez à le reconnaître. Cela se reflète sur vous",
a expliqué à l'IWPR l'anthropologiste Gregory Stanton. Celui-ci,
fondateur et président de l'organisation internationale Genocide Watch,
est un ancien employé du State Departement des Etats-Unis, où il avait
aidé à rédiger la résolution de l'ONU afin de mettre en place le
Tribunal pour crimes de guerre au Rwanda.
En Allemagne, par
exemple, cela a pris au moins vingt ans pour que le pays commence à
assumer l'Holocauste, nous a expliqué Stanton.
Si la guerre en
Bosnie a pris officiellement fin il y a 13 ans, certains observateurs
sentent que les Serbes de Bosnie, en particulier, ont encore un long
chemin à parcourir avant d'affronter leur propre rôle dans les
atrocités commises, notamment quand il s'agit du crime de viol.
"
Il existe des hommes qui admettront avoir commis des crimes contre l'humanité avant que de reconnaître le viol",
déclare Sara Sharrat, une psychologue clinicienne, qui ces trois
dernières années a codirigé un projet pour les femmes qui témoignent de
violences sexuelles au Tribunal de La Haye et dans les tribunaux de
Bosnie.
"
On admet plus facilement dans les grandes villes, mais loin s'en faut de ce qu'il faudrait", a-t-elle dit à l'IWPR. "
Mon impression est que cela n'est pas pour un proche avenir... Il n'y a guère eu de cicatrisation."
Une
partie du problème, selon d'autres, tient au climat général de déni qui
continue d'imprégner la partie serbe de la Bosnie - la Republika Srpska
- et la Serbie elle-même.
Sonja Biserko, présidente du Comité
Helsinki pour les droits de l'homme en Serbie, nous a expliqué que durant la
guerre les médias en Serbie ont diffusé une quantité énorme de
propagande pro-serbe, anti-bosniaque.
"
Ce fut une guerre préventive contre une force [bosniaque] génocidaire - c'est ainsi que les médias ont présenté les choses", a-t-elle dit.
Même
maintenant, a-t-elle ajouté, nombre de Serbes rechignent à faire face à
ce qui s'est passé pendant la guerre, et ils semblent satisfaits de
laisser cela à "l'histoire" pour établir ce qui s'est passé.
Une phrase commune répétée en Serbie actuellement est "
l'histoire dira ce qui c'est passé", prétend-elle. "
C'est ce que vous entendez tout le temps, même dans les médias."
"
Mais qu'est-ce que l'histoire ?", demanda-t-elle. "'
L'écoulement du temps ?"
Des suspects vivraient en ville
Assis
dans un café en plein air sur les berges de la Drina, un Serbe de
Bosnie alluma une cigarette et pointa vers le vieux pont ottoman.
"
Regarde, ce pont a été construit en 1571", a-t-il dit. "
Il y a autant de personnes tuées là [pendant la guerre]
qu'il y a de briques dans le pont. C'est le plus grand cimetière."
Au bout d'un moment il a ajouté "
je ne traverse jamais ce pont, j'utilise celui-là en bas pour aller travailler."
L'homme
qui a vécu à Višegrad pendant l'été 1992 et qui continue encore
maintenant, a ajouté que lorsque la Drina était remplie de cadavres,
quelqu'un ouvrait une vanne sur un barrage situé en aval du fleuve pour
les évacuer.
Il a accepté de parler à l'IWPR à condition de
garder l'anonymat, car il craignait d'être pris comme cible pour s'être
exprimé. Tout en parlant, il jettait des regards tout autour pour voir
si quelqu'un observait. Parler de la guerre n'est pas quelque chose qui
se fait ici.
Nombre d'habitants, a-t-il expliqué, se sont vus
offrir de grosses sommes d'argent pour garder le silence, en
particulier parce que l'on sait que certains criminels de guerre
soupçonnés - et même condamnés - vivent en ville.
L'un de ceux
qu'il a explicitement nommé était Oliver Krsmanović, un ancien associé
de Milan Lukić. Tous deux ont été condamnés par contumace à vingt ans
de prison par un Tribunal pénal de Belgrade en 2003.
Lukić et
Krsmanović, avec deux autres hommes, ont été condamnés pour avoir
enlevé 16 Bosniaques d'un bus dans la ville frontalière serbe de
Sjeverin le 22 octobre 1992. Les hommes kidnappés furent emenés à
Višegrad où ils furent torturés [2], puis exécutés sur les berges de la
Drina, a prétendu l'accusation. Il reste à retrouver leurs dépouilles.
Jasna
Sarčević-Janković, une porte-parole du bureau du procureur pour les
crimes de guerre de Belgrade, a confirmé que Krsmanović est toujours
dans la nature. Elle a dit que le bureau du procureur ne dispose
d'aucune information sur ses allées et venues, et qu'il appartient à la
police de l'arrêter.
Mais l'habitant de Višegrad à qui l'IPWR a parlé a prétendu savoir exactement où Krsmanović se terre.
"
J'ai vu Oliver Krsmanović avant-hier", dit-il. "
Il
n'a pas quitté sa maison depuis des années. S'ils veulent l'arrêter,
ils devraient venir me trouver, et je les aiderai à approcher sa maison
de nuit. Je garantis qu'ils le trouveront dans sa chambre."
Buvant
une gorgée de son expresso, il a dit ne pas savoir pourquoi Krsmanović
n'a pas été arrêté, étant donné que ses allées et venues sont de
l'ordre du secret de polichinelle dans la ville.
Quand on lui a demandé s'il avait été hanté par les choses dont il a été témoin, l'homme est resté tranquille un moment.
"
Je n'ai pas pu dormir la première année [après que la guerre eut pris fin]
", a-t-il dit. "Je prenais des somnifères. [Mais]
je n'ai jamais rien fait qui puisse faire du mal à quelqu'un et je pense avoir beaucoup fait pour aider."
En
quelques occasions, poursuit-il, il a caché des enfants bosniaques dans
sa maison jusqu'à ce qu'il soit en mesure de les faire passer en
territoire tenu par les Bosniaques.
Lorsqu'il s'est rassis sur
la chaise couleur jaune du café, par à-coup successifs il a exprimé des
craintes à s'exposer ou alors une vaillante volonté de parler
franchement.
"
Je n'ai pas peur", a-t-il dit. "
Ils peuvent me faire ce que bon leur semble. Trois mille personnes [assassinées]
sont plus importantes que moi."
[1] Condamnés depuis lors, comme il a été dit.
[2] La preuve par ces
images dont je préviens qu'elles sont violentes.
Source :
Višegrad Genocide Memories
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