L'Eurasie, un projet géopolitique ?
Au soir du 21 février, même si un compromis pacifique paraît s'établir en Ukraine entre les deux moitiés du pays, l'une occidentale pro-européenne et l'autre, orientale pro-russe, il est évident que ce compromis ne durera pas si une entente en profondeur entre l'Europe et la Russie ne se réalise pas rapidement. C'est d'ailleurs par un début d'entente de ce type que la crise en Ukraine, après diverses péripéties diplomatiques, a pu évoluer vers un commencement de règlement.
La gravité de cette crise, et le dialogue qui à cette occasion s'est établi entre l'Europe et la Russie, offre l'opportunité de lancer un projet géostratégique à long terme, baptisé Eurasie. Longtemps apparu comme relevant de l'utopie, beaucoup d'observateurs pensent qu'un tel projet apparaîtra rapidement, dans les temps troublés qui nous attendent, comme indispensable au développement conjoint des deux parties intéressées, l'Europe et la Russie. L'Ukraine ne pourrait-elle pas être un pivot, au moins géographique, autour duquel s'articulerait une alliance eurasiatique de bien plus grande ampleur? La présente note en propose une discussion.
Avant cela, rappelons en introduction ce que l'on peut mettre derrière les deux concepts évoqués dans le titre de cet article:
Introduction
Précisons ici ce que nous proposons d'entendre, d'abord par le concept d'Eurasie, et ensuite par celui de projet géopolitique
L'Eurasie
Le terme a plusieurs sens. Retenons
celui selon lequel il s'agirait d'un rapprochement, politique,
économique mais aussi culturel, entre
pays européens de l'Europe continentale (difficile d'y inclure la
Grande Bretagne), et ceux de la Fédération de Russie, ou Russie ,
éventuellement accompagnée de certains des Etats périphériques
(http://fr.wikipedia.org/wiki/Russie).
L'idée en a été évoquée plusieurs fois par Vladimir Poutine, en
termes assez sibyllins pour que certains y voient une résurgence de
l'ancien Pacte de Varsovie défendu par l'ex-Union soviétique. Elle
suscite de ce fait une opposition violente des gouvernements des pays
membres de l'Otan. Ceux-ci, sous l'influence des Etats-Unis qui ne
cessent de se renforcer, contrairement aux apparences, persistent à
vouloir faire de l'Europe, non seulement un glacis défensif, mais
une plateforme à partir de laquelle menacer le Russie, notamment sur
le plan militaire.
En Europe, quelques forces politiques,
encore timides, évoquent un projet beaucoup plus vague, celui
d'euroBRICS, coopération stratégique entre
les pays de l'UE et ceux du BRICS en premier lieu desquels sa place
la Russie,
(http://fr.wikipedia.org/wiki/Br%C3%A9sil,_Russie,_Inde,_Chine_et_Afrique_du_Sud).
En quoi un projet d'Eurasie se différencierait-il du projet
d'EuroBRICS? En ceci qu'il serait plus limité. Dans sa version la
plus réaliste, l'Eurasie n'intéresserait que l'Europe et la Russie,
excluant les autres pays asiatiques. Mais la Russie s'y étendrait
jusqu'à ses frontières Pacifique. L'Eurasie ainsi conçue ne se
limiterait donc pas à la partie européenne de la Russie.
Un projet géopolitique
Le terme de projet géopolitique désigne un projet d'alliance ou de
rapprochement politique entre Etats partageant un même espace
géographique. Celui-ci, même à l'âge de la mondialisation des
échanges, entraine nécessairement des intérêts communs. Face aux
autres grands ensembles géopolitiques, Amérique du Nord, Amérique
du Sud, Asie proprement dite, Afrique, le projet géopolitique
d'Eurasie viserait à constituer un centre d'action susceptible de
contrebalancer le poids de ces grands ensembles, ce qu'aucun des pays
composants ne pourrait faire seul. Le projet devrait aussi servir à
combler des vides là où rien de bien
cohérent n'existe encore.
Discutons maintenant les arguments
en défaveur et ceux qui sont au contraire en faveur d'un projet
d'Eurasie Europe-Russie
1) Arguments en défaveur d'un
projet d'Eurasie Europe Russie
En premier lieu vient le
manque d'enthousiasme, voir le refus, émanant des populations
concernées. En Europe règne encore la peur de la Russie, considérée
comme susceptible de réactiver l'ancienne guerre froide et de
vouloir utiliser son potentiel militaire considérable pour soumettre
à terme les pays européens L'objectif serait de tenter de séparer
l'Europe des Etats-Unis en détruisant l'Alliance Atlantique. Cette
peur est entretenue en permanence par les milieux européens dits
atlantistes, et par les Etats-Unis eux-mêmes. Elle s'appuie sur des
arguments qui ne sont pas toujours valables, tels que le rôle joué
par Poutine dans sa jeunesse au sein du KGB. Ce serait la preuve que
le vieil Etat stalinien est toujours très présent. Nous pensons
pour notre part que ni la Russie, ni même Poutine, n'ont les moyens,
sauf à brandir l'argument militaire, de menacer l'Europe. Ce n'est
d'ailleurs pas leur intérêt, comme nous le verrons.
Si la peur de la Russie semble très répandue chez les peuples européens, notamment à l'Est de l'Union européenne, les populations russes ne semblent pas non plus très enthousiastes à l'idée d'un rapprochement avec l'Europe, dont elles craignent un bouleversement de leurs traditions historiques.
L'Eurasie ne pouvant se faire contre l'avis des peuples, d'importantes campagnes d'information devraient être menées par les promoteurs de ce projet pour convaincre démocratiquement les électeurs de l'intérêt mutuel de celui-ci.
Viennent en second lieu des arguments de type politico-économique,
plus particulièrement évoqués en Europe. La Russie, en dehors des
avantages momentanés qui lui donnent ses réserves en pétrole et en
gaz, est un pays appauvri, vieillissant, sous-peuplé, fortement
concurrencé à son Est par le Chine. Par ailleurs, elle souffre de
maux sociétaux traditionnels qui pourrait menacer l'Europe en cas de
rapprochement: manque de pratique démocratique et d'Etat de droit,
hyper-administration, corruption, influence excessive des oligarques
voire des maffias. Tout ceci n'est pas faux, mais si la Russie était
en tous points devenue semblable à l'Union européenne, elle en
serait membre depuis longtemps. Dans tous les domaines cités, il
faudrait que l'Europe s'efforce de convaincre la Russie de l'intérêt
de ses propres bonnes pratiques. Cela ne devrait pas être très
difficile car on observe une vraie demande en ce sens des populations
russes.
En troisième lieu on fera valoir les « sanctions »
de toutes sortes que les Etats-Unis pourraient en cas de
rapprochement euro-russe, imposer à des économies européennes très
liées à eux. Ces sanctions seraient eu fait tout à fait
improbables, car n'étant dans l'intérêt de personne. Mais la
narrative américaine, bénéficiant d'un écho surdimensionné
dans des médias européens très soumis à celle-ci, conserve une
grande influence . A l'inverse au contraire de cette narrative, on
pourrait en Europe, compter sur une évolution moins
néo-conservatrices de l'opinion américaine, sous l'influence de
mouvements libéraux commençant à prendre de l'importance. Tout
laisse penser par ailleurs que si l'Amérique a besoin pour maintenir
sa cohérence de se donner un ennemi, ce sera la Chine qui, dans
l'esprit des jeunes générations, remplacera la Russie dans ce rôle.
2) Arguments en faveur d'un projet d'Eurasie Europe-Russie
L'argument essentiel est celui de la complémentarité, complémentarité des ressources, considérées au sens large et complémentarité dans l'intérêt qu'il y aurait à les développer en commun.
La complémentarité est d'abord géographique, facteur essentiel nous l'avons rappelé dans une union géopolitique. Inutile de développer ce point. Il suffit de regarder une carte pour s'en convaincre. En résumant beaucoup on dira que la Russie pourrait accéder, notamment par l'intermédiaire de la France, à des espaces maritimes qui lui sont encore très difficiles à atteindre. A l'inverse l'Europe pourrait accéder aux régions polaires et sibériennes qui, convenablement gérées, prendront de plus en plus d'importance dans la perspective du changement climatique.
La complémentarité est ensuite économique. L'Europe, hautement industrialisée, pourrait aider la Russie à se développer dans ces domaines, tout en bénéficient en retour des ressources russes, notamment énergétiques et minières (terres rares) . Dans cette rubrique, on pourra aussi mentionner le lancement en commun de grands programmes de recherche-développement, concernant notamment toutes les technologies NBIC, mais aussi l'espace et la défense. L'Allemagne et la France, dans de telles perspectives, pourraient devenir, à des titres différents, des partenaires essentiels pour la Russie.
Au plan culturel, on se bornera à rappeler que la Russie, au moins dans sa partie européenne, a toujours fait partie d'un vaste ensemble de pays partageant des traits communs. Les forces politiquement conservatrices, en Europe, n'ont pas manqué d'ailleurs de remarquer, pour s'en féliciter, l'évolution de la Russie, y compris à l'initiative de Vladimir Poutine. Celle-ci est en train de redevenir un bastion de conservation et de religiosité qui devrait rassurer.
Enfin, au plan politico-diplomatique, la complémentarité sera de plus en plus évidente C'est déjà largement le cas en ce qui concerne la lutte contre les mouvements islamiques radicaux, aussi dangereux en Russie qu'en Europe et au Moyen Orient. Leur extension s'opère actuellement en Afrique sub-saharienne. Même si l'Europe traite ce problème différemment de ce que fait la Russie, des coopérations s'imposeront. A plus long terme, on doit considérer qu'un bloc eurasiatique cohérent pourrait peser dans l'inévitable compétition avec les grands Etats déjà dominants (USA, Chine) et avec ceux dits émergents, mieux que ne le ferait l'Europe et la Russie seules. Il ne s'agira pas d'entretenir des attitudes belliqueuses à leur égard, mais de se comporter en négociateurs disposant de forces équivalentes.
Conclusion. Un processus progressif
Les divergences et procès d'intention sont encore si vifs entre les deux partenaires éventuels d'un coopération eurasiatiques que les mouvements politiques et les hommes politiques convaincus de son intérêt devront proposer une démarche progressive, s'inscrivant dans une durée de peut-être 20 ans. Mais qui dit progressivité ne signifie pas ne pas prendre des décisions immédiates, sur des points emblématiques.
Il est trop tôt aujourd'hui pour prévoir l'évolution de la crise en Ukraine. Nous pensons cependant, comme d'ailleurs un nombre croissant d'observateurs et de conseillers politique, que sans attendre, les Européens devraient prendre contact avec le gouvernement russe pour que l'Ukraine soit dotée d'une nouvelle constitution, peut-être fédérale, et d'un ensemble d'institutions dites démocratiques. (Voir notre éditorial en ce sens daté du 19/02/2014 http://www.europesolidaire.eu/article.php?article_id=1259&r_id=) Ainsi pourrait-elle devenir un premier pont au sein d'un futur ensemble eurasiatique. Mais les mesures juridiques ne suffiraient pas. Il faudrait que conjointement, Europe et Russie investissent des sommes importantes (au moins 50 milliards dès maintenant) pour relancer l'économie ukrainienne. Ce pays est potentiellement riche, et si ces milliards sont utilisés, sous le contrôle des donateurs, pour relancer avec succès les investissements divers en Ukraine, l'exemple serait retenu.
Il est inutile ici de mentionner les autres domaines où, au delà de l'Ukraine, des coopérations stratégiques pourraient sans attendre être engagées avec profit entre l'Europe et la Russie. Les listes ne manquent pas, de part et d'autre. Nous y avons fait allusion plus haut. Citons en priorité l'espace, l'agriculture subarctique et plus généralement la coopération scientifique, technique et universitaire.
Cet article n'est que l'esquisse d'un dossier plus important, sur lequel nous consultons nos correspondants.
Source : http://blogs.mediapart.fr/blog/jean-paul-baquiast/220214/leurasie-un-projet-geopolitique
Les récents événements nous rappellent que la démocratie se conjugue de différentes manières et que la technocratie emploie différentes stratégies pour la combattre.
Dans ces trois cas forts différents, on peut parier que les méthodes technocratiques posent plus de problèmes qu'elles n'en résolvent, en particulier dans le cas ukrainien.
Les déclarations faites par certains sont d'ailleurs assez éloquentes :
"Le secrétaire américain au Trésor, Jack Lew, indique avoir eu des discussions avec son homologue russe, Anton Siluanov, en marge du G20. «Les Etats-Unis et d'autres pays sont prêts à aider l'Ukraine dans ses efforts de retour à la démocratie, à la stabilité et la croissance», déclare-t-il lors d'une conférence de presse. «Nous espérons que la fin des violences en Ukraine mènera à un gouvernement multipartite et technocrate, désireux de mener les réformes économiques nécessaires», ajoute-t-il, notant que le FMI était l'interlocuteur idéal."
Source : leparisen.fr, le 23 février 2014.
Les manifestations se poursuivent à Sarajevo
Pour le 17ème jour consécutif une manifestation devrait avoir lieu à Sarajevo aujourd'hui après-midi.
Environ 200 manifestants s'étaient réunis hier en face de la présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine. Ils ont bloqué un certain temps deux artères centrales de la ville.
Les démonstrations d'aujourd'hui ont lieu à la veille de la séance de l'Assemblée cantonale de Sarajevo où l'on s'attend à ce que soient adoptées sans délai les revendications du plénum. Ces demandes ont été adoptées vendredi 21 février par le collège de l'assemblée cantonale.
Le collège a accepté les quatre demandes du plénum :
[...]
Hier des manifestations se sont également déroulées à Mostar et Zenica.
Source : http://www.abrasmedia.info/content/ta%C4%8Dno-u-podne-nastavljaju-se-protesti-u-sarajevu
Plus de 500 citoyens aux manifestations de Zenica
Aujourd'hui encore plus de 500 citoyens de Zenica ont participé aux manifestations sur la Place Alija Izetbegović. Ils ont ensuite entamé une marche pacifique à travers le centre-ville jusqu'au bâtiment de la municipalité de Zenica et du gouvernement cantonal. Un grand nombre de travailleurs accompagnés de leur famille se sont unis au rassemblement protestataire.
Les représentants du plénum citoyen de Zenica avaient transmis antérieurement leurs revendications aux collège de l'Assemblée cantonale, et lors de la dernière réunion ils ont remis au gouvernement cantonal une demande pour que soient rapidement versés les fonds budgétaires prévus pour différents groupes sociaux, notamment pour les victimes de guerre, les combattants démobilisés et les invalides, dont les arriérés d'allocations remontent à trois ans.
Le plénum citoyen attend beaucoup de la prochaine session de l'assemblée cantonale qui aura lieu le mardi 25 février.
Source : http://www.abrasmedia.info/content/vi%C5%A1e-od-500-gra%C4%91ana-na-protestima-u-zenici
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