Procréation assistée : le difficile parcours des couples stériles en Croatie
Zagreb - La Croatie dispose de l'une des lois les plus restrictives en Europe sur la procréation assistée et des couples stériles en sont réduits à envisager de se rendre à l'étranger pour réaliser leur voeu le plus cher, avoir un enfant.
"C'est vraiment dur et triste que l'on puisse limiter votre désir d'enfant, qui relève de l'instinct", soupire Ksenija Puskaric, en allusion à la loi croate sur la procréation médicalement assistée (PMA). Après deux tentatives de fécondation in vitro (FIV), elle et son mari vont se tourner vers la Slovénie voisine.
Cette loi adoptée en juillet 2009 interdit la congélation des embryons et autorise la fécondation de seulement trois ovocytes pour une tentative de fécondation in vitro.
Les autres ovocytes recueillis sont congelés pour plus tard. Mais pour les couples en mal d'enfant, cette pratique réduit considérablement les possibilités d'en avoir un.
"Je suis un très bon exemple que la loi est mauvaise", s'exclame Jelena, une économiste de 26 ans, en évoquant ses deux tentatives de FIV dans un hôpital de Zagreb.
Pour la première tentative, trois ovocytes ont été fécondés, sans résultat, et cinq autres ont été congelés pour plus tard, conformément à la loi.
Mais à la deuxième tentative, seuls trois de ces cinq ovocytes ont survécu à la décongélation mais aucun n'a été fécondé car ils avaient été endommagés lors de l'opération.
Jelena entend poursuivre, elle aussi, son traitement dans une clinique slovène où elle devra débourser 3.000 euros pour tous les soins requis.
Aucun pays d'Europe ne limite le processus de FIV à trois ovocytes puisqu'il n'est pas possible de déterminer à l'avance leur capacité à être fécondés, relève Karmen Rivoseki-Simic, membre d'une association locale, RODA, qui lutte pour les droits des parents et a contesté la loi auprès de la Cour constitutionnelle.
De même, ajoute-t-elle, aucun pays européen n'interdit totalement la congélation d'embryons.
Les nouvelles règles croates en matière de procréation assistée ont été votées par le pouvoir conservateur, suscitant l'indignation d'une grande partie de l'opposition, des groupes des droits de l'Homme mais aussi des couples subissant des traitements douloureux et déjà incertains.
La précédente loi croate sur la PMA, la première en Croatie, autorisait la congélation d'embryons. Elle remontait à 1978, l'année de la naissance du premier bébé éprouvette au monde.
Les débats sur un nouveau projet de loi ont commencé dès la fin des années 1990, mais ils n'ont pas atteint le parlement en raison de la forte opposition de l'Eglise catholique à la fécondation in vitro.
L'Eglise joue un rôle déterminant en Croatie dont la population, forte de 4,4 millions d'habitants, est à près de 90% catholique.
La nouvelle législation est d'ailleurs considérée par ses détracteurs comme une concession faite par le pouvoir conservateur à l'Eglise qui estime que la vie commence au moment de la conception.
"L'embryon est un être vivant, alors nous ne permettons pas la congélation d'embryons", avait fait valoir le ministre croate de la Santé, Darko Milinovic.
et celle des oreillons ?
Une psychologue sociale, Mirjana Krizmanic, estime que "l'Eglise a exercé une influence inacceptable" sur les législateurs et que "les droits de l'Homme sont bafoués par la loi en vigueur".
"Le droit parental est un des droits fondamentaux de l'Homme et si on doit y parvenir avec une assistance médicale, cela doit être fait de la meilleure façon possible", a-t-elle dit.
Source : romandie.com, le 7 juillet 2010.