Cela fait quatre jours déjà que durent les blocages de la circulation et les manifestations paysannes à ciel ouvert à travers toutes la Croatie continentale. L'ampleur et la vitesse avec laquelle la révolte s'est propagée rappellent imanquablement les blocages des facultés menés par les étudiants l'année dernière. Bien que certaines organisations paysannes se soient placées du côté des manifestations, il est évident que les organisations ne peuvent représenter ni contrôler les manifestants. Les paysans refusent explicitement que les politiciens et les bureaucrates paysans corrompus négocient sur le sort qu'on leur réserve. Si des cartes de membres du Parti paysan croate ont massivement été brûlées la veille à titre symbolique, cela montre suffisamment le niveau de désenchantement vis-à-vis des institutions paysannes traditionnelles. Lorsque le Gouvernement dans le cadre des "mesures d'épargne" avait annoncé une réduction des subventions agricoles allant jusqu'à 40%, il en est peu qui s'étaient attendus à une telle résistance de la part des paysans.
Les paysans sont déjà habitués aux problèmes avec les subventions, qui en majorité n'ont pas encore été versées pour l'année 2008. Cependant, la réduction en question a bien obligé les paysans à en conclure que leur subsistance économique est tout simplement menacée. Les subventions agricoles ne sont nullement un cadeau ou une protection publique particulière. Même en Europe occidentale la production agricole n'est pas soutenable sur les marchés, raison pour laquelle tous les pays, en particulier les plus riches, allouent des moyens fort élevés pour leur propre agriculture. Ainsi la réduction des subventions signifie-t-elle la destruction de notre production locale de nourriture, ce qui favorise directement les producteurs d'Europe occidentale, lesquels producteurs, grâce à de grosses subventions accordées par leurs pays respectifs, peuvent placer des produits bon marché sur notre marché. Un tel favoritisme envers les producteurs étrangers est la conséquence des fortes pressions que les institutions de l'UE exercent sur la Croatie mais aussi de la politique folle de notre Gouvernement qui cède à ces pressions. Bien que le Gouvernement justifie ces réductions de subventions par la nécessité d'épargner en période de crise, ces explications apparaissent hypocrites car les mesures récemment prises ont montré qu'en dépit de la crise le Gouvernement est prêt à allouer de gros moyen pour sauver les profits du grand capital. La réduction des subventions agricoles n'est pas une mesure d'épargne mais bien du favoritisme à l'égard du grand capital, qu'il soit national ou étranger. Tout cela au détriment des petits producteurs et des travailleurs. De telles mesures de réduction ou même de complète suppression des subventions agricoles sont également proposées par l'opposition. La volonté de soudoyer, d'abord les laitiers, ensuite d'offrir des versement sous forme de matières premières, mais aussi les basses tentatives des médias afin de discréditer l'ensemble des manifestations, montrent à quel point le pouvoir craint ces manifestations. C'est pourquoi il est encourageant de voir que les paysans ne cèdent pas dans leur résistance et qu'ils annoncent pour ce lundi une grosse descente des tracteurs sur Zagreb.
Source : hap.bloger.hr, le 7 mars 2010.