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Titre du blog : Balkanikum
Auteur : Balkanikum
Date de création : 14-08-2008
 
posté le 28-01-2010 à 13:58:58

Un lycéen contre Milorad Dodik
 


Le jeune Radovan Papović de Gacko a récemment publié sur le portail BLIN un texte dans lequel il n'a pas épargné le pouvoir actuel sous la conduite du Premier ministre Milorad Dodik. En ce jeune adolescent s'est concentré tout le mécontentement de l'Herzégovine orientale provoqué par les fausses promesses sur la prospérité et les investissements dans cette partie de la Republika Srpska. Dans l'interview accordée il nous dit pourquoi il tient rancune au pouvoir, il nous dit s'il est difficile de critiquer les hommes de position et s'il craint les réactions. D'après lui, les jeunes sont eux-mêmes fautifs pour tout ce qui leur arrive, mais il dit ne pas appartenir à cette génération qui veut quitter la région et tenter sa chance quelque part bien loin !


D'après la tribune que tu as publiée chez nous il ressort très bien que tu es fort insatisfait par la vie à Gacko et par la façon dont se comporte le pouvoir envers cette localité. Qu'est-ce qui, hormis les fausses promesses sur une vie meilleure, a provoqué autant d'insatisfaction ?

Mon insatisfaction, mais aussi celle plus générale, en Bosnie orientale découle du comportement dans son ensemble de l'équipe au pouvoir et de leur relation envers notre région. Comment penser que le peuple en Herzégovine puisse croire cela lorsque dans toute l'Herzégovine il [Milorad Dodik] a investi en quatre ans environ un million de marks, alors qu'il a accordé un crédit de trois millions de marks rien qu'à son fils. Les gens en Herzégovine sont mécontents à cause des promesses non tenues, des affaires criminelles de plus en plus visibles qui accompagnent le Premier ministre et de la façon dont il gouverne le pays. Qui de normal en ces temps difficiles construit un édifice gouvernemental de la Republika Srpska pour une valeur de 200 millions de KM, alors que nous avons 200.000 chômeurs ? Ce qui me fâche c'est de voir comment Milorad Dodik insulte notre intelligence et pense que nous sommes un peuple stupide et naïf pour ne pas voir ce qu'en quatre ans il a fait. Il a vendu Telekom et a obtenu 1,5 milliards de KM avec lesquels nous aurions pu mettre en branle tout le pays, mais au lieu de cela il a distribué l'argent à ses fils, ses parrains et amis. Lorsque Dodik s'en ira, il nous laissera une caisse vide, 200.000 chômeurs, une économie en faillite et des dettes qu'il nous faudra rembourser pour les 50 ans à venir.


Est-il difficile de se poser en critique du pouvoir actuel dans une petite localité comme Gacko, as-tu subi des condamnations et crains-tu les réactions ?

Critiquer le pouvoir n'est nullement un boulot gratifiant car cela provoque un torrent de réactions, aussi bien positives que négatives, mais je n'ai jamais eu peur des réactions parce que je ne suis pas une personne qui ne fait que critiquer ou attaquer l'actuelle équipe au pouvoir. Je ne suis membre d'aucun parti politique, je n'ai pas encore eu l'occasion d'utiliser mon droit de vote et on ne peut donc pas dire à mon sujet que j'appartiens à l'opposition et que c'est pour cela que je critique le pouvoir actuel. Au contraire, je suis un réaliste qui ne critique pas mais qui présente la situation telle qu'elle est. Je n'ai rien dit dans mon texte qui ne soit la vérité ; je n'ai fait que citer le Premier ministre Dodik et de-là écrire ce qui a été fait ou pas. J'ai critiqué le Premier ministre parce qu'il nous a menti par rapport à tout ce qu'il nous avait promis et, dans mon texte, je n'ai exposé aucune contre-vérité mais seulement des faits. Lorsque le Premier ministre Dodik remplira ses promesses, lorsqu'il construira une centrale thermique à Gacko et un aéroport à Trebinje et qu'il réalisera ses autres promesses je serai le premier à le louer et à le soutenir. Mais, tant qu'il considérera plus important le fait qu'Adil Osmanović n'ait pas fêté la Journée de la Republika Srpska plutôt que le fait que nous ayons 200.000 chômeurs, il n'aura pas mon soutien et je ne cesserai de le critiquer. Mon texte a reçu beaucoup de réactions positives de tout bord car les gens au travers de ce texte y ont vu l'essence de tous nos problèmes. Gacko est une petite ville d'une dizaine de milliers d'habitants tout au plus et les gens sont ravis, y compris ceux qui appartiennent au parti au pouvoir, que quelqu'un dans les médias finissent par aborder les problèmes existentiels de notre peuple.


Une bonne partie des jeunes en Bosnie-Herzégovine (concernant la Republika Srpska) sont plutôt léthargiques et ils suivent sans grand intérêt ce qui se passe. Qui est coupable de ce que les jeunes soient passifs et qu'est-ce que tu reproches le plus aux jeunes de ton âge ?

Les jeunes dans la Republika Srpska sont déçus et froissés à cause des relations que maintient le pouvoir avec eux. J'ai des amis dont les parents travaillent pour 200-300 marks et qui tentent d'assurer à leur enfant des conditions normales d'existence puis qui, une fois le soir venu, apprennent au "Journal Télévisé" que Milorad Dodik accorde un prêt de trois millions de marks à son fils à peine majeur, qu'il lui a acheté une nouvelle Mercedes de 250.000 marks et qu'il lui a payé des études à Milan. Les jeunes dans ce pays sont conscients de ce que l'enseignement est catastrophique, qu'il n'y a pas de travail et que les espoirs en un avenir meilleurs ont presque disparu. Tous les jours j'entends auprès de ceux de mon âge des rêves de voitures rapides et de millions qu'ils gagneront dans les paris sportifs ou au casino. Le principal responsable pour la passivité des jeunes et l'équipe au pouvoir qui par ses agissements les a complètement déçus et découragés. Toutefois, nous aussi nous partageons partiellement la faute car nous nous nous comportons comme des idiots en permettant que l'élite politique nous mente et nous abuse, qu'elle ne se souvienne de nous qu'au moment de la campagne électorale. Nous sommes fautifs car nous restons assis, nous regardons comment ils nous racontent des bobards et nous pillent pendant que nous nous taisons, alors qu'au lieu de cela il faudrait que nous parlions, braillons contre ce qu'ils nous fabriquent. Voilà, je suis l'un des rares a avoir ouvertement parlé des promesses non tenues du pouvoir actuel, et l'on peut compter sur les doigts d'une main ceux qui sont prêts à parler ouvertement comme je le fais. Il n'y a pas d'espoir pour les jeunes tant que chaque jour nous n'aurons pas des dizaines et des centaines de jeunes qui parleront des problèmes des simples gens, qui critiqueront et qui inciteront le pouvoir à se consacrer à nous. Personne ne va nous faire des présents ; pour un lendemain meilleur il nous faudra nous battre nous même.


Des indications montrent que la plupart des jeunes souhaitent quitter cette région et tenter leur chance dans un autre endroit, ce que certaines enquêtes ont également confirmé. Appartiens-tu à cette catégorie et qu'est-ce que tu en penses ?

Vous avez tout à fait raison de dire que les jeunes veulent partir en quête d'une vie meilleure et de progrès, mais moi je n'en fais pas partie, j'appartiens plutôt à cette catégorie de jeunes qui veulent rester au pays, se former afin de travailler ici et se battre pour un lendemain meilleur dans ce pays. Le plus facile est de claquer la porte et de partir, mais il ne faut pas espérer que là où vous allez vous attends une vie meilleure. Il est clair que les jeunes sont mécontents de la situation existante et cela est normal car le pouvoir ne se soucie pas d'eux comme il le faudrait, pourtant il ne faut pas nous leurrer avec un bien-être qui nous attends derrière la frontière. La personne jeune qui quitte la Republika Srpska pour l'étranger, et qui ne se souvient de nous qu'avant les élections n'est rien d'autre qu'un traître. Je conseille à tous les jeunes de partir à l'étranger pour étudier, puis de revenir en Republika Srpska pour investir dans ce pays leurs connaissances acquises de manière à ce que nous construisions ensemble une société meilleure et plus prospère.


Récemment dans le texte qu'a publié le magazine BLIN, tu n'as pas épargné le Premier ministre actuel Milorad Dodik. En particulier tu as souligné les problèmes de cette partie de la Republika Srpska et les fausses promesses datant de la campagne électorale. Comment vit-on aujourd'hui à Gacko, et les gens sont-ils déçus de ce que beaucoup a été promis mais presque rien réalisé ?

Gacko est une ville avec tout au plus une dizaine de milliers d'habitants et elle se trouve dans la partie orientale de la Republika Srpska que le Gouvernement a négligée. Mais, à la différence de Bileća et de Rudo qui meurent à petit feu, Gacko a eu la chance d'avoir une centrale thermique qui emploie 1.700 personnes de toute l'Herzégovine orientale et qui nourrit toute la ville. On ne peut pas dire que les habitants de Gacko vivent mal, mais pas non plus bien, ils vivent quelque part dans la moyenne. Toutefois, si nous tenons compte du potentiel de cette commune il est évident que nous aurions pu être les Herzégoviniens de Laktaši - nous avons tout ce qui est nécessaire sauf que nous n'avons pas un Premier ministre. S'agissant des promesses, les gens de Gacko et de toute l'Herzégovine ont cru en Milorad Dodik et ses promesses en 2006, mais quatre ans plus tard il s'est avéré qu'il nous a menti. Les Herzégoviniens sont des gens d'honneur, honnêtes et fiers, qui ne permettront pas que quelqu'un leur mente et les trompe. Les Herzégoviniens ont compris à temps qu'ils ont été abusés et extorqués et que l'on ne peut nullement croire l'équipe gouvernementale, aussi lui a-t-elle répliqué lors des élections locales. Le mécontentement du peuple est grand, et d'ici octobre il va grandir. Toutefois, si Milorad Dodik devait rester au pouvoir après octobre, nous en Herzégovine n'aurions rien à espérer et il est certain qu'un triste sort nous attendra. J'espère tout de même que le mécontentement herzégovinien va s'étendre à toute la République et que les gens comprendront que tous ceux qui volent et pillent leur propre peuple ne méritent pas de rester au pouvoir. Les gens qui volent leur propre peuple n'ont pas leur place au Gouvernement mais en prison ; et sans doute qu'ira en prison tout pouvoir qui viendra à nous mentir et piller, car nous ne le permettrons pas.

 

Source : e-novine.com, le 26 janvier 2010.