"L'Eglise ne dit rien sur Sanader parce qu'elle regarde exclusivement ses propres intérêts matériels"
Bien que tous ceux dont la voix compte en Croatie aient donné leur avis sur la chocante démission de celui qui jusque hier était le Premier ministre Ivo Sanader, le Capitole* a quant à lui sagement décidé de ne rien dire. Pourquoi ? C'est ce qu'explique dans un entretien pour Business.hr le sociologue don Ivan Grubišić.
"Nous n'avons aucun commentaire. Si la Conférence épiscopale de Croatie devait se prononcer à ce propos, nous en informerions les médias, mais pour l'instant nous n'avons aucun commentaire", nous a brièvement déclaré Zvonimir Antić, le porte-parole de la Conférence épiscopale de Croatie.
Bien que nous lui ayons expliqué qu'il s'agit d'un événement de toute première importance sur lequel se sont prononcés tous les acteurs-clés de la société, et que quand ils le veulent les évêques croates savent s'adresser à l'opinion pour des faits bien plus secondaires, Antić est resté "muet comme une carpe".
Nous avons trouvé un interlocuteur un peu mieux disposé dans la personne du sociologue et prêtre don Ivan Grubišić, dont il n'est pas rare que l'opinion diverge de celle du Capitole, quoique non sans solides arguments.
"Je peux dire qu'en principe le Capitole ne réagit que très rarement à chaud, et qu'il attend plutôt d'obtenir des informations précises, si bien que pas mal de temps peut s'écouler avant qu'une réaction n'ait lieu, et il se peut même qu'il ne réagisse nulllement. Ainsi, l'Eglise réagit-elle par le silence et laisse le champ aux suppositions, ce qui selon moi n'est pas bon, mais c'est là le style de travail de l'Eglise. Ils ne disposent pas de suffisamment d'informations saisissables et ils ne veulent donc pas s'aventurer sur ce cas, à mon avis, psychiatrique", nous a déclaré Grubišić, puis il a expliqué pourquoi il estime que la démission de Sanader est particulièrement irresponsable.
"Cette démission, ce 'je m'en vais - je m'en vais pas, je serai président -je ne serai pas président', me fait davantage songer à une monarchie qu'à une démocratie. S'il a remis sa démission, il lui fallait alors la remettre au Parlement, pour que le Parlement le destitue, que le président désigne un mandataire puis ce dernier des ministres, mais non pas de la sorte - en tant que monarque qui a légué la Croatie en héritage à son admiratrice. Cette démission non motivée est une grosse faute, et, selon moi, on y relève des éléments pour une analyse psychologique, voire pathologique", rajoute Grubišić dans l'entretien pour Business.hr.
"En tant que sociologue ce qui me gêne c'est que la monarchie ait fait son temps, alors que lui se comporte tel un monarque qui ne répond pas devant le Parlement qui l'a confirmé, et qui doit par conséquent le destituer. Ainsi tout est-il resté conforme à l'identité négative qui est la sienne ; ce qu'il a fait ne sied pas à sa situation ni à sa personne" - estime Grubišić.
Etant donné que Sanader s'est comporté d'une façon extrêmement irresponsable envers les institutions du pouvoir, mais aussi envers les citoyens de la Croatie, nous avons demandé à Grubišić s'il n'aurait pas justement fallu pour cette raison que l'Eglise, qui tente de donner l'impression d'une institution qui se préoccupe des intérêts des masses populaires les plus larges, se prononce sur "le capitaine qui abandonne le navire"?
"La question est de savoir ce que l'Eglise veut pour de bon. Verbalement et en apparence elle défend les masses, mais là où elle ne voit pas ses intérêts, il n'y a pas non plus de réaction. Que l'Eglise se soucie du peuple - ce sont là des phrases. Si le peuple était son souci, alors elle annoncerait qu'elle renonce à l'argent émanant du budget de manière à venir en aide à ceux qui en ont réellement besoin, de sorte qu'il est illusoire de s'attendre à ce que l'Eglise prenne la défense du peuple. L'Eglise ne défend que ce qu'elle a acquis par elle-même, en premier lieu sur le plan matériel mais aussi social. Si l'on vient à y toucher, alors à coup sûr elle réagira séance tenante, mais s'il s'agit d'intérêts communs, alors il n'y a pas de réaction", achève Grubišić.
* le siège de l'Eglise catholique en Croatie (N.d.T.)
"Crkva šuti o Sanaderu jer gleda isključivo vlastite materijalne interese"
Iako su se o šokantnoj ostavci dojučerašnjeg premijera Ive Sanadera oglasili svi oni čiji glas nešto znači u Hrvatskoj, službeni Kaptol odlučio je - mudro šutjeti. Zašto - u razgovoru za Business.hr objašnjava sociolog don Ivan Grubišić.
"Nemamo nikakvih komentara. Bude se Hrvatska biskupska konferencija oglasila o tome, mi ćemo to javiti medijima, ali zasad nemamo nikakav komentar." - kratko nam je rekao Zvonimir Antić, glasnogovornik Hrvatske biskupske konferencije.
Iako smo mu objasnili da se radi o događaju prvorazredne važnosti o kojem su se već oglasili svi relevantni društveni faktori, a hrvatski se biskupi javnosti znaju obraćati i s puno manjim povodom, Antić je ostao "zakopčan do grla".
Nešto raspoloženijeg sugovornika našli smo u uglednom sociologu i svećeniku don Ivanu Grubišiću, koji nerijetko odstupa od stava službenog Kaptola, ali ne bez jakih argumenata.
"Načelno mogu reći da Kaptol vrlo rijetko reagira na prvu loptu, nego čeka da dobije određene informacije, tako da može proći dosta vremena prije reakcije, a možda uopće ni ne reagira. Crkva, dakle, reagira šutnjom i ostavlja prostor za nagađanja, što po meni nije dobro, ali to je stil rada crkve. Nemaju dovoljno ulaznih podataka pa se ne žele izleti o ovom, po mom mišljenju, psihijatrijskom slučaju." - rekao nam je Grubišić, pa pojasnio zbog čega misli da je Sanaderova ostavka krajnje neodgovorna.
"Ovakva ostavka, ovo "idem - ne idem, bit ću predsjednik - neću biti predsjednik", meni to sve skupa više izgleda kao monarhija, a ne demokracija. Ako je dao ostavku, onda ju je morao podnijeti Saboru, pa neka ga Sabor razriješi, pa neka predsjednik imenuje mandatara a on ministre, a ne ovako - kao monarh koji je u nasljeđe svojoj obožavateljici ostavio Hrvatsku. Ta neobrazložena ostavka je velik propust, a po meni tu ima i elemenata za jednu psihološku odnosno patološku analizu." - dodao je Grubišić u razgovoru za Business.hr.
"Mene kao sociologa smeta što je vrijeme monarhija prošlo, a on se ponaša kao monarh koji ne odgovara parlamentu koji ga je potvrdio, pa ga mora i razriješiti. Ovako je sve ostalo u skladu s tim nekim njegovim negativnim identitetom, ovo što je napravio ne dolikuje ni njegovom položaju ni njegovoj osobi." - smatra Grubišić.
Obzirom da se Sanader ponio krajnje neogovornosti prema institucijama vlasti, ali i građanima Hrvatske, pitali smo Grubišića ne bi li se upravo zbog toga Crkva, koja pokušava ostaviti dojam institucije koja brine za interese širokih narodnih masa, trebala oglasiti o "kapetanu koji napušta brod"?
"Pitanje je što Crkva istinski želi. Ona verbalno i deklarativno brani mase, ali tamo gdje nema interesa kako ih gleda Crkva, tamo nema ni reakcije. To da je Crkvu briga za narod - to su fraze. Da ju je briga za narod, onda bi rekli da se odriču novca iz proračuna kako bi se pomoglo onima kojima zaista treba, tako da je iluzorno očekivati od Crkve da stane u zaštitu naroda. Crkva štiti samo ono što je sama stekla, kako prvenstveno materijalno ali i društveno, kad bi se u to dirnulo onda bi sigurno odmah reagirala, ali kad se radi o općim interesima, onda nema reakcije." - zaključio je Grubišić.
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Source : Business.hr, le 2 juillet 2009.
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A propos de la démission de Sanader, voir la note sur le blog de Natacha Rajaković, avec davantage de questions que de réponses.