“Pernar à la place d'Hasanbegovic” titre le site Bilten.
Zlatko Hasanbegovic est l'ancien ministre croate de la culture qui s'est fait connaître par certaines positions conservatrices et en particulier une volonté de réduire les financements des médias de la gauche-libérale. Le Courrier des Balkans qui donne le La sur les infos francophones concernant les Balkans l'a qualifié de révisionniste pro-nazi...
Ivan Pernar est quant à lui un jeune député au parlement croate qui fait partie de la formation eurosceptique Zivi zid. Son impétuosité et son franc-parler en ont fait une des étoiles montantes de la jeune génération dans les Balkans qui commence à secouer le joug de Bruxelles et Washington.
D'après l'article de Bilten, "Le nouveau parlement constitué et la nouvelle équipe gouvernementale en Croatie ont aussi introduit du changement sur la scène médiatique : la vedette principale n'est plus Zlatko Hasanbegovic, ce titre a été repris par Ivan Pernar de Zivi zid."
Novi saziv Sabora i novi sastav hrvatske Vlade donijeli su i pomak na medijskoj sceni: glavna politička zvijezda više nije Zlatko Hasanbegović, titulu je preuzeo Ivan Pernar iz Živog zida.
Bilten explique que les deux viennent combler un espace vide, ces apparitions politiques relèvent d'un phénomène généralement appelé le “populisme”.
Takav prazan prostor zauzimaju svakojake političke pojave, najčešće etiketirane terminom “populizam”.
Bilten formule la critique suivante : “Alors que ladite nouvelle droite attribuait le délabrement social et politique aux manipulations des élites communistes, Pernar les attribue aux intérêts des élites mondialistes guidées par les Etats-Unis et aux loges maçonniques. La simple critique du suivisme inconditionnel de la politique croate aux diktats de Washington et Bruxelles, combinée à une bizarre sincérité et persévérance, a suffi pour faire de Pernar une figure politique et une marchandise médiatique. Mais c'est bien là où réside le potentiel dévastateur qu'implique son apparition politique. Dans sa quête d'authenticité (il a été membre d'à peu près tous les partis ces dix dernières années ainsi qu'un participant actif de la plupart des initiatives dites citoyennes), Pernar a fini par soulever les problèmes majeurs de la politique croate négligés depuis des décennies. Mais par ses interventions et ses folles théories du complot, il a en réalité disqualifíé à long terme ces thématiques et problèmes qui restent dans le domaine de passe-temps pour exaltés ou de maladies infantiles dans l´évolution politique.”
Dok je tzv. nova desnica uzroke političke i socijalne devastacije vidjela u manipulacijama komunističkih elita, Pernar ih vidi u interesima globalnih elita predvođenima SAD-om i masonskim ložama. Sama kritika bezostatne naslonjenosti hrvatske politike na diktat Washingtona i Bruxellesa u kombinaciji s bizarnom iskrenošću i ustrajnošću, dovoljna je da od Pernara stvori prepoznatljivu političku ličnost i medijsku robu. No, tu se nalazi i potencijal najveće štete koji njegova politička pojava nosi sa sobom. U svom traganju za autentičnošću (bio je član valjda svih stranaka u zadnjih deset godina, kao i aktivni sudionik većine tzv. građanskih inicijativa), Pernar je dospio do ključnih problema hrvatske politike koja već desetljećima ostaju neadresirana, ali svojim pristupom i sumanutim teorijama zavjere zapravo dugoročno te probleme i teme delegitimira kao relevantne. One ostaju u domeni hobija entuzijasta ili dječjih bolesti u političkom razvitku.
Ivan Pernar seront donc un exalté qui brouille les cartes par son penchant pour les théories du complot. Il est à noter que le court article de Bilten ne s'attache pas à démonter une seule théorie du complot dont souffre Ivan Pernar.
Profitons en pour se pencher sur Bilten, ce site régulièrement traduit par le Courrier des Balkans. Nous tenterons pour notre part, bien sûr, d'éviter les théories du complot...
Bilten est un site d'information régionale écrit en croate. Il est financé d'une part par la Fondation Rosa Luxembourg de l'Europe du Sud-est et de l'autre par le ministère de la Culture de la République de Croatie. (Source)
Dans ce qui va suivre on pourra juger qu'il ne s'agit en aucun cas d'un site indépendant des pouvoirs politiques.
Qu'est-ce que la Fondation Rosa Luxembourg ?
L'article wikipédia en allemand nous signale que contrairement à ce qu'indique son nom, sa forme juridique n'est pas celle d'une fondation mais celle d'une “Association enregistrée” (Eingetragener Verein - e.V.), comne c'est le cas pour d'autres fondations proches des partis politiques. Elle est financée par des dons, des cotisations de membres et en particulier par des subventions de l'Etat. En 2015 celui-ci lui a attribué environ 47 millions d'euros.
Wie es auch bei den meisten anderen parteinahen Stiftungen der Fall ist, hat die RLS trotz des Namens nicht die Rechtsform einer Stiftung, sondern eines Eingetragenen Vereins. Sie finanziert sich aus Spenden, Mitgliedsbeiträgen und insbesondere aus staatlichen Zuschüssen. Von diesen erhält sie im Jahr 2015 rund 47 Mio. €
Proche du PDS, c'est en 1999 que la Fondation Rosa Luxembourg a obtenu les premiers financements publics.
Les fondations politiques allemandes sont financées principalement sur fonds publics, au prorata du nombre d'élus de chaque parti au Parlement. Le montant annuel total des subventions est de l'ordre de 300 millions d'euros, répartis entre les ministères fédéraux de la Coopération économique et de développement, de l'Intérieur, des Affaires étrangères et de l'Education. (Source)
Si la fondation Rosa Luxembourg n'est pas la mieux dotée parmi ses consoeurs allemandes, ses moyens sont tout de même considérables. “En 2010, la Fondation Adenauer a obtenu 125 millions d’euros de budget, possède 80 filiales dans le monde, dirige des projets dans 120 pays et emploie 563 salariés. La Fondation Ebert a reçu 149 millions d’euros, emploie 620 salariés, possède 110 filiales et dirige des projets dans 110 pays. La Fondation Naumann reçoit 46 millions d’euros, salarie 188 personnes, possède 44 filiales et dirige 100 projets dans le monde. La Fondation Heinrich Böll reçoit 50 millions d’euros, salarie 278 personnes dans le monde dans 52 filiales et dirige des projets dans 72 pays. La Fondation Rosa Luxemburg reçoit 30 millions d’euros, emploie 134 personnes dans 14 filiales dans le monde et dirige des actions dans 50 pays. Enfin, la Fondation Hans Seidel a reçu 46 millions d’euros, salarie 182 personnes dans 29 pays.” (Source)
Plus spécifiquement “dans les Balkans, la fondation Rosa Luxemburg a financé la partie politique du Subversive Festival de Zagreb, le Forum des Balkans, en 2012 et 2013. Actuellement, elle travaille à la création d’un parti de gauche de type « Syriza » en Serbie et Bulgarie, ce qui depuis des décennies de défaite de la gauche dans ces pays apparait très attractif pour de nombreux jeunes militants issus des nouveaux mouvements sociaux de 2011 en Serbie et 2013 en Bulgarie.” (Source)
La Fondation Rosa Luxembourg ne peut être comprise que dans le spectre plus large des fondations allemandes chargées de promouvoir les intérêts allemands à l'étranger.
“Les fondations sont devenues en quelques décennies un instrument irremplaçable de la politique étrangère allemande. Leur place à part dans le paysage politique et institutionnel leur permet, entre autres, de remplir un rôle d'information et de médiation à double sens : en Allemagne, auprès des ministères (en particulier le ministère des Affaires étrangères et le ministère de la Coopération) et de leur parti de tutelle ; à l'étranger, auprès de différents acteurs politiques, les fondations privilégiant en général les contacts avec des formations partageant des idées ou des valeurs proches des leurs, qu'il s'agisse de partis politiques, de groupes d'intérêt, de syndicats, de centres de recherche ou de formation, d'organisations non gouvernementales etc., mais aussi auprès des ambassades allemandes avec lesquelles elles sont en contacts étroits.”(source)
On ne peut parler d’autonomie financière pour les puissantes fondations allemandes puisque “ces organisations sont financées à 95% par des fonds publics. Il n’est donc pas étonnant que le rapport du Ministère de la Coopération de juin 1969 déjà cité ait défini le rôle des fondations et autre agences comme des instruments de formation des élites politiques des pays visés dans le but de conformer les attitudes et décisions de ces élites aux intérêts nationaux de l’Allemagne.” (Source)
“De l'avis formulé par le président fédéral Roman Herzog, en 1996, les fondations politiques restent aujourd'hui encore "l'un des instruments les plus efficaces et éprouvés de la politique étrangère allemande, si on ne se limite pas aux seules méthodes et au savoir traditionnel de la diplomatie".”(Source)
Considérant son financement, le site d'information Bilten serait-il la voix de son maître allemand ? Ces gens auraient-ils perçu en la personne d'Ivan Pernar une noix autrement plus dure à croquer que le pauvre Zlatko Hasanbegovic et sa malheureuse révolution conservatrice ?