En Croatie la Gay Pride de Split sert même à s’en prendre au président serbe
En effet dans son dernier article du Jutarnji list, Davor Butković, qui écrit sur la Gay Pride de Split, dit ceci :
« Vous n’êtes pas obligés de marquer votre sympathie, ni même d’avoir du respect pour les membres de la communauté homosexuelle. Pareillement vous n’êtes pas obligés de marquer votre sympathie, ni même d’avoir du respect pour toute autre manifestation, que ce soit le défilé des supporters du Dinamo, les manifestations syndicales, les protestations contre toute forme de pouvoir (qui ont semblé populaire en Croatie à la fin du mois de février l’année dernière), ou encore les processions religieuses à la Porte de pierre à Zagreb. Vous n’êtes d’ailleurs pas obligés de marquer votre sympathie ou votre respect pour la venue du Pape en Croatie.
Tout cela relève de votre propre opinion, de votre éducation, de votre système de valeurs. Cependant tant qu’une manifestation ne contrevient pas à la loi, et n’appelle pas à la violence ou à la discrimination envers un groupe social déterminé, elle ne saurait être interdite ni entravée. »
Le reste de l’article, assez répétitif, ne fait qu'égrener ce credo libéral, contre lequel il n’y a rien à reprocher même s'il vient d'un néo-libéral.
En revanche l’avant dernier paragraphe mérite qu’on s’y arrête.
En effet Davor Butković ajoute : « La Gay Pride peut montrer à quel point nous somme meilleurs qu’un Nikolić ou qu’un Loukachenko, et leur grand parrain, le dictateur Vladimir Poutine. »
Etant donné que Tomislav Nikolić vient tout juste d’entrer en fonction (il a prêté serment hier !), et que personne ne sait encore quelle sera sa position envers les minorités sexuelles, la remarque de Butković n’est rien d’autre qu’une déclaration gratuite de dédain envers le voisin de l’Est.
En effet, il semble que les Croates ressentent de plus en plus le besoin d’affirmer leur supériorité envers les Serbes. C’était déjà le cas pour l'historien Tvrtko Jakovina qui se berçait récemment d’illusions en affirmant à propos de l’élection de Tomislav Nikolić : « En l’occurrence la Croatie, en tant que membre de l’OTAN et de l’UE, est dans une position confortable et il ne faut pas trop s’inquiéter, toutefois Zagreb pourrait profiter de l’occasion et se transformer en leader régional. » Ce besoin d’affirmer sa supériorité ne trahit-elle pas au contraire un nouveau sentiment d’infériorité en raison du déclin économique de la Croatie. A ce propos l’agence de crédit Moody vient aujourd’hui de maintenir la note de crédit de la Croatie mais en l’assortissant d’une tendance négative.
Le tourisme ayant
probablement atteint son âge d’or, les deux pays côtiers inféodés à Washington
que sont la Croatie et l’Albanie se retrouvent en perte de vitesse par rapport
à l’intérieur du continent balkanique qui a gardé un embryon d'industrie. Il est vrai que cette perte de vitesse
est à peine sensible, en effet tous les pays de la région y compris la Serbie ont de grosses
difficultés économiques, mais elle n'en est pas moins réelle.
C'est ainsi que l'on a vu lors du sommet de Chicago la Croatie et l'Albanie se ranger du côté de la Macédoine dans le conflit autour du nom qui l'oppose à la Grèce. La Bulgarie a quant à elle cherché à ne pas prendre position. Preuve que ce n'était pas une obligation. En outre la Macédoine ne faisant pas partie de l'OTAN, contrairement à la Grèce, il est assez révélateur que deux pays de l'OTAN (la Croatie et l'Albanie) aient pu prendre une telle position. Le but poursuivi par ces deux pays, comme on le voit d'après l'interview de Vesna Pusić, est de faire entrer au plus vite dans l'OTAN la Macédoine (un coin placé entre la Serbie et la Grèce), la Bosnie-Herzégovine ainsi que le Monténégro, cela afin de contrebalancer leur propre déclin économique.