Second tour des élections présidentielles en Serbie
Le nouveau président de la Serbie est Tomislav Nikolić. Boris Tadić a reconnu sa défaite. Pour rappel, les électeurs serbes ont voté aujourd’hui au second tour des élections présidentielles.
La Commission électorale serbe a annoncé que jusqu’à présent, d’après les bulletins dépouillés, Tomislav Nikolić a obtenu 50,25% des voix tandis que Boris Tadić en a récolté 46,77%.
Analyse :
Pour une raison ou l’autre, de nombreux médias locaux, régionaux et étrangers ont qualifié ces élections de décisives pour l’ « avenir européen de la Serbie », en suggérant par-là que Tadić représente la voie pro-européenne tandis que Nikolić est quant à lui considéré comme un nationaliste qui prendra une autre direction. Si les électeurs serbes ont cru à cette histoire, alors ils seront assez déçus par le nouveau président qui juste avant les élections a promis que « la Serbie ne dévierait pas de sa voie européenne », une déclaration rapportée par la BBC dans ses rapports sur les élections en Serbie. Il est également dit que la participation a été relativement faible : en dessous des 45%. On estime que ce fait a contribué à la victoire de Tomislav Nikolić.
La politique des anciens pays de la République fédérale socialiste de Yougoslavie, que ce soit la Slovénie ou la Macédoine, est à peu près semblable, les différences supposées étant principalement l’œuvre d’ « artifices » médiatiques. De pures questions de forme distinguent les candidats. Un revirement tectonique dans le domaine politique et économique – quelle que soit la direction – n’est tout simplement pas donné aux électeurs au travers de telles options. La Serbie se trouve dans une situation assez difficile. Une grosse partie du secteur bancaire est détenu par des banques grecques, ce qui en dit déjà assez long.
Un autre fait assez indicatif est la participation : les habitants de la Serbie par leur boycott des élections serbes ont montré ce qu’ils pensent des deux candidats et de leurs politiques qui n’apportent quasiment rien en termes de redressement économique. « La voie européenne », l'orientation vers une telle UE équivaut à volontairement se précipiter vers un iceberg. La Croatie se trouve dans une situation particulièrement difficile, un destin qui ne lui apportera rien de bon est déjà tracé et désormais seule reste une amère attente. Malheureusement, à en juger par les actuelles élections serbes, la Serbie se trouve sur la même voie qui mène vers l’exploitation et l'émergence des colonies dites périphériques, sous la mainmise du grand capital et des élites financières occidentales. Tout comme la Croatie et d’autres pays de l’ex-Yougoslavie, elle y est déjà largement engagée.
Source : advance.hr, le 20 mai 2012.
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Analyse personnelle :
Comme je l’ai déjà dit sur ce blog, je ne crois pas que Tomislav Nikolić soit apte à moderniser la Serbie. Le bonhomme est profondément conservateur et ce n’est pas bon pour la Serbie. Il prône des valeurs telles que la famille, la patrie, l’honnêteté, etc… Tout cela est très joli mais si on ne redonne pas du pouvoir aux gens, ce ne sont jamais que des concepts grandiloquents que n’importe qui peut manier sans aucune utilité concrète.
Deuxièmement je ne pense pas non plus que Nikolić va combattre la corruption. Peut-être qu’elle ne lui plaisait pas lorsqu’il était dans l’opposition, par contre une fois bien installé au pouvoir elle lui sera beaucoup moins odieuse. Qu’on n’en doute pas une seconde. Et après tout la corruption en Serbie est un phénomène ancestral qui traîne depuis quelques siècles, alors je pense qu’il vaut mieux être réaliste sur ce point.
Ceci dit, dans la victoire de Nikolić je vois deux éléments positifs qui n’ont pas été relevés par advance.hr. Tout d’abord Boris Tadić était le candidat favori des médias serbes. Or en Europe il est absolument exceptionnel que le candidat du système n’accède pas au pouvoir comme convenu. Certes il aurait été préférable que les citoyens fassent mentir le système de façon active plutôt que par l’abstention mais il n’empêche qu’il s’agit d’un coup de théâtre plutôt sympathique en soi. Il y a certainement eu quelques grincements de dents parmi ceux qui tiennent le haut du pavé à Belgrade et ailleurs en Serbie au moment où les résultats des élections s’affichaient sur les écrans.
Le deuxième point positif est que Tadić était également le favori des anglo-saxons, toujours obnubilés par la Russie. L’ambassadrice américaine à Belgrade s’était clairement positionnée en faveur de Tadić et on peut se douter qu’aujourd’hui le macabre Obama n’a pas beaucoup de raison d’être fier d’elle. Cela vaut autant pour l’ambassadrice anglaise à Belgrade qui ne doit pas s’attendre à ce que Cameroun lui envoie un bouquet de fleurs dans les jours qui viennent. Un revers anglo-saxon, si petit soit-il, est toujours une bonne nouvelle pour le monde libre.
Mais en définitive, ce qu’il faut
bien voir (en cela je rejoins l’analyse d’advance.hr)
c’est que les citoyens serbes ne gagneront ni ne perdront rien avec l’un ou l’autre
candidat. Cette lutte pour le pouvoir est un épisode de plus qui s’inscrit dans les
batailles à l’intérieur du capitalisme, ce genre de bataille qu’on peut voir à
chaque coin de rue entre petits caïds qui veulent faire la loi dans leur
quartier. Par exemple, en Hongrie, l’arrivée d’Orban au pouvoir a soulevé moults tempêtes dans un verre d’eau. Et pourtant ses prédécesseurs
étaient aussi infects que lui, si pas plus. Ce sont eux qui ont vendu la
Hongrie aux étrangers en la précipitant ainsi dans le déclin. Orban lui n’a fait qu’hériter
de cette situation ingérable. Avec Nikolić nous allons probablement assister
aux mêmes réactions passionnées sur son arrivée au pouvoir, surtout parmi la diaspora serbe. Alors, avant
que les gens ne commencent à se crêper le chignon, il faut leur rappeler que c’est
Tadić et son prédécesseur Vojislav
Koštunica qui ont bradé toute la Serbie en se moquant des lendemains. Nikolić, lui, n'est jamais que leur produit.
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En supplément j'ai ajouté deux liens sur des blogs par ailleurs très respectables.
Ecrits par des Serbes de la diaspora (l'une est visiblement installée en Suisse, et le second je présume qu'il vit en France), ils montrent bien à quel point le mythe de l'Europe est dans toute les têtes, plus efficace que n'importe quel lavage de cerveau.
Cherz auteurs de blog, vous n'avez aucune idée du dynamisme des pays émergents. A côté de cela votre UE fait pitié. Propriété de petits aristrocrates rusés et de gros bourgeois débonnaires qui vous ont endormi et continuent de profiter de votre inertie. Sortez de votre TFI, sortez de votre cocon, sortez de votre liquide amniotique. Ne vous contentez pas du Festival de Cannes comme horizon intellectuel.
Sortez de votre américanisme, sortez de la décadence ! Révoltez-vous et rejoignez le monde libre ! On est libre quand on crée, quand on produit quelque chose. On n'est pas libre lorsqu'on est un Occidental armé de ses fausses certitudes.
Vive le monde libre !