Le noir n’est pas ainsi noir
Par Vedrana Rudan
Plusieurs fois par an la Croatie est témoin d’une guerre acharnée entre les « fascistes » et les « non-fascistes ». Il est aisé de reconnaître les uns et les autres. Les « fascistes » croates se rendent à Bleiburg habillés en noir et coiffés de bérets tout aussi noirs.
Hier des « fascistes » importés auraient dû se réunir sur la place du Ban Jelačić avec leurs collègues croates. Qui sont ces gens ? Ces gens, vous avez déjà dû les voir une centaine de fois sur vos petits écrans. Des gaillards baraqués et patibulaires au crâne rasé qu’on retrouve dans presque tous les pays d’Europe et qui sont désireux de nettoyer leurs pays respectifs des étrangers, de gré ou de force… Quant au reste de leur programme… je préfère oublier.
Dans l’ensemble nous savons ce qu’ont été ces fascistes et ce qu’ils sont restés. Ce sont des ennemis de la démocratie, des sauvages et des brutes qui ne répugnent à aucun crime. D’où les vestes ou les uniformes noirs qu’ils se mettent sur le dos.
Il est entendu que tout pays normal, dont nous nous revendiquons, a aussi ses fervents « antifascistes ». Eux ne portent pas d’uniforme. Ce sont de vieux partisans qui en pleurnichotant dans le micro expliquent à ceux en train d’attendre leur série favorite pourquoi ils se sont battus. A cela s’ajoute des gamins qui se sont fort d’aimer leur proche, fût-il étranger, pour autant qu’il ne soit pas « fasciste ». L’histoire est fort simple, banale au fond. Ces gens de gauche et de droite se font filmer en vue d’expliquer au monde…
Quoi donc ? A part qu’ils aiment attirer l’attention. Pour des gens ne signifiant vraiment rien l’occasion de se faire mousser est unique. Les médias les couvrent, les villes leur accordent des autorisations de se réunir avant de les retirer, la police sort ses matraques ou se contente de menacer. Et leurs parents les regardent à l’écran tout extasiés qu’un des leurs passe ce soir à la télé.
Même les politiciens ne renâclent pas devant les « fascistes ». Pour Milanović l’occasion fut grandiose, il en a lourdement profité pour claironner que la Croatie est un pays qui n’aime pas le fascisme. Bien sûr il n’y a que les cons pour ne considérer comme « fascistes » qu’une bande de minables plus ou moins ivrognes qu’obsède l’idée de montrer leurs tatouages.
Les vrais fascistes, les gredins qui rendent le monde réellement mauvais ne défilent pas, ils n’exhibent pas leur torse et ne gueulent pas. Nous avons le souriant Obama qui est encore pire que Bush même si c’est à peine croyable.
Nous avons Sarkozy qui nettoie la France des Tsiganes et de tous les autres cafés au lait. Nous avons les Britanniques qui massacrent là où Obama leur dit de massacrer. Nous avons l’OTAN.
Nous avons le gouvernement de l’Etat israélien qui proclame Günter Grass « antisémite » rien que pour avoir déclaré que l’Occident est hypocrite et qu’Israël pèsera comme une menace sur le monde tant qu’il sera dirigé par ceux qui le dirigent.
Présentement j’y vois la forme la plus pure du fascisme. Est-ce qu’un de nos dirigeants a jamais parlé du seul fascisme mondial ? Il ne faut pas y compter. Au contraire, les enfants du pays l’honorent de leur vie en Afghanistan et d’ici quelques mois ce sera en Iran. Au nom de « l’antifascisme », cela s’entend.
Est-ce qu’un seul intellectuel ou gauchiste ou antifasciste croate a pris la défense de Günter Grass. L’idée ne les effleure pas. Pour se voir traiter d’antisémite, une étiquette plus difficile à effacer que le numéro que les SS gravaient sur la peau des Juifs, des Tsiganes, des Serbes, des Croates… Il est bien plus facile, bien plus indolore et politiquement bien plus correct de se rendre sur la place du Ban Jelačić pour s’y confronter courageusement aux « fascistes » revêtus de leurs chemises noires.
En ce qui me concerne, ces gaillards, qu’ils soient « rouges » ou « noirs », peuvent se promener tant qu’ils veulent dans le centre de Zagreb, ils peuvent brailler ce que bon leur semble. Ils sont inoffensifs, insignifiants, impuissants au même titre que les mascarades ou parades d’homosexuels. En revanche ils sont aussi nécessaires que le pain à nos politiciens. C’est grâce à eux qu’ils font croire aux citoyens qu’ils combattent le « fascisme », convaincus que nous sommes tous assez cons que pour ne pas voir la supercherie.
Mais je les comprends. Il est bien plus facile d’interdire un rassemblement de « fascistes » que de faire sortir la Croatie de l’OTAN fasciste. D’ailleurs, ils n’y pensent même pas.
Je me résume : la Croatie est un pays fasciste acoquiné avec les plus grands fascistes planétaires. Nos enfants meurent et mourront au nom du fascisme planétaire. Jamais nos médias ne parleront ou ne diront la vérité sur le fascisme mondial.
Qu’Obama et compagnie ne descendent pas dans les rues couverts de tatouages, habillés en noir et le crâne rasé fait-il d’eux des antifascistes ? Sommes-nous trop bête que pour croire que le fascisme n’est pas ce qui porte l’uniforme et tue des enfants en Afghanistan, à Gaza, en Irak, en Lybie… ?
Qui pourrait faire la liste des objectifs passés et futurs de ces combattants aseptisés du « fascisme » ? Dans le monde moderne ce n’est plus la couleur noire qui est arborée. Ce qui est arboré c’est le fascisme de toutes les couleurs.
Source : rudan.info, le 13 avril 2012.