posté le 01-07-2011 à 10:18:32
Général Divjak : Lettre ouverte à Borisa Colak
Publiée le 29 juin dans les médias bosniens par un groupe d’intellectuels et de citoyens français, la lettre ouverte appelle le ministre de la Justice de la Bosnie-Herzégovine à retirer la demande d’extradition du général Jovan Divjak, retenu par la justice autrichienne.Monsieur le Ministre,
Juristes, enseignants et artistes, nous sommes des citoyens français qui, dès avril 1992, ont dénoncé l’agression subie par la Bosnie-Herzégovine et pris le parti de sa capitale assiégée. Depuis ce moment, nous n’avons cessé de nous préoccuper du retour de la paix et de la consolidation de la justice dans votre pays.
C’est pourquoi nous sommes indignés par le sort actuellement réservé au général Jovan Divjak. Le rôle énergique et courageux qu’il a joué dans la défense de Sarajevo, sous les tirs des milices et d’une armée fédérale (JNA) qui avait trahi ses idéaux, est reconnu partout dans le monde et constitue aujourd’hui encore un motif de fierté pour les habitants de la ville. Sa fondation Education Builds B&H aide les enfants victimes de la guerre, sans considération d’origine ni préférence religieuse.
Depuis trois mois, Jovan Divjak est retenu en Autriche, empêché de rentrer à Sarajevo sur la foi d’un mandat émis par la Serbie qu’Interpol a pourtant refusé de valider. Le parquet de Belgrade lui impute, sans la moindre preuve, une responsabilité dans les morts qui furent déplorés rue Dobrovoljačka, lors du retrait négocié d’une colonne de la JNA, le 3 mai 1992. Ejup Ganic, vice-président de la République au moment des faits, a été arrêté à Londres en 2010 dans le cadre de la même enquête, mais la cour britannique a estimé que l’accusation était inspirée par des motifs politiques, qu’elle ne reposait sur aucun élément sérieux et elle l’a donc libéré le 27 juillet. Déjà ministre de la Justice à cette époque, vous vous étiez abstenu d’exiger l’extradition d’Ejup Ganic, que ce soit en qualité d’accusé ou de simple suspect. Nous ne comprenons donc pas pour quelle raison vous avez présenté cette fois, au nom de la Bosnie-Herzégovine, une demande d’extradition de Jovan Divjak, puisque sa responsabilité dans l’affaire n’est pas davantage avérée. Une enquête a été ouverte dès 2005 par le procureur de la Cour d’État de Bosnie-Herzégovine sur le dossier Dobrovoljačka. Si cette dernière reprend à son compte la liste de suspects dressée par la Serbie, alors ce sont dix-neuf personnes et pas seulement Jovan Divjak qu’elle devrait entendre.
Non seulement cette demande d’extradition que vous avez transmise à la justice autrichienne parait entériner les assertions hasardeuses de votre homologue de Belgrade, mais elle signifie également que la justice bosnienne concentre ses seuls efforts sur un seul nom. Cette initiative que vous avez validée choque d’autant plus l’opinion publique européenne que M. Divjak n’est pas inculpé devant la Cour d’État, qui l’a déjà auditionné comme témoin dans le passé. Par ailleurs, il a clairement manifesté le désir de retourner au plus vite à Sarajevo, où il pourra parfaitement répondre en homme libre à toute nouvelle demande d’audition formulée par les magistrats. Votre requête est donc inappropriée. Elle est en outre inopportune, car elle retarde le moment pour les juges autrichiens de constater le caractère infondé de la demande d’extradition du parquet de Serbie.
Nous espérons qu’aucun motif de politique intérieure ne l’a inspirée et que vous allez la retirer sans délai. Nous n’osons pas imaginer que vous pourriez faire un cas particulier du général Divjak, et lancer des poursuites à son encontre parce qu’il professe des convictions différentes des vôtres et qu’il se bat pour une Bosnie-Herzégovine unie, protégeant les droits et les libertés de ses citoyens indépendamment de leur appartenance ethnique et de leur préférence partisane.
Confrontée à deux requêtes concurrentes de Belgrade et de Sarajevo, la justice autrichienne a décidé le 22 juin de consulter les instances judiciaires des deux pays avant de déterminer celle qui doit l’emporter. Cette procédure aux résultats hypothétiques risque d’allonger de manière insupportable la rétention de Jovan Divjak, tant que les deux pays n’auront pas épuré leurs contentieux. Vous pouvez hâter son retour, vous le devez, M. le Ministre, en renonçant à votre demande. Il suffirait alors aux magistrats autrichiens de déclarer, comme leurs collègues britanniques le firent le 27 juillet 2010 à propos de M. Ganic, l’irrecevabilité de la demande de Belgrade. Cela leur serait d’autant plus aisé que la Serbie n’a fourni aucune pièce probante depuis cette date. Il n’échappe à aucun observateur avisé que son acharnement contre le général Divjak ne sert qu’à flatter les extrémistes, les chantres de la « purification ethnique » et les nostalgiques de la « grande Serbie » qui ont mal digéré l’arrestation de Ratko Mladic.
La justice bosnienne, quant à elle, sortirait grandie de cette affaire. D’abord elle rendrait sa liberté à Jovan Divjak, qui ne souhaite que recouvrer son honneur, retrouver sa famille, travailler dans l’intérêt des générations futures à travers sa fondation et demeurer dans la ville qu’il a défendue au péril de sa vie. Ensuite, elle pourrait recueillir dans une libre déposition le témoignage de cet homme, comme celui des autres protagonistes, afin d’approfondir sa propre enquête et d’établir la vérité sur les faits de la rue Dobrovoljačka. Enfin et surtout, elle serait lavée du soupçon de s’être prêtée à une manœuvre politique indigne d’un État démocratique qui aspire à rejoindre un jour l’Union européenne.
La justice rendue aux victimes est une condition indispensable de la réconciliation entre les peuples. À condition qu’elle ne soit pas instrumentalisée à des fins contraires. L’Europe ne voudra pas cautionner les tentatives de réviser l’histoire de la guerre et de régler des comptes personnels par le biais de procédures judiciaires dévoyées. Il faut vite rendre la parole au droit, M. le Ministre.
Antoine Garapon, magistrat, secrétaire général de l’Institut des Hautes Études sur la Justice
Florence Hartmann, écrivaine, ancienne correspondante de guerre dans les Balkans, ancienne conseillère auprès du procureur en chef du TPIY et du TPIR
Louis Joinet, magistrat, premier avocat général honoraire à la Cour de Cassation, ancien expert indépendant auprès des Nations Unies
Maguy Marin, chorégraphe
Ariane Mnouchkine, metteuse en scène, directrice du Théâtre du Soleil,
Olivier Py, metteur en scène, directeur de Théâtre national de l’Odéon,
François Tanguy, metteur en scène, Théâtre du Radeau
Emmanuel Wallon, professeur de sociologie politique à l’Université Paris Ouest Nanterre
Monique Chemillier-Gendreau, professeure émérite de droit public et de science politique à l’Université Paris Diderot
Jean-Louis Fournel et Pierre Bayard, professeurs à l’Université Paris Saint-Denis
Jack Ralite, ancien ministre, sénateur de la Seine-Saint-Denis.
Francuski intelektualci: Otvoreno pismo bh. ministru
Grupa francuskih intelektualaca poslala je pismo Bariši Čolaku, ministru pravde Bosne i Hercegovine, u kojem traže da pomogne generalu Armije BiH i heroju odbrane Sarajeva Jovanu Divjaku koji se nalazi u kućnom pritvoru u Austriji iščekujući rešenje u vezi sa zahtjevom Srbije za izručenje na osnovu poternice za navodne zločine u Dobrovoljačkoj ulici u Sarajevu 1992. godine.
Pismo prenosimo u cjelini:
Otvoreno pismo gospodinu Bariši Čolaku
Ministru pravde Bosne i Hercegovine
Pariz, 28. juni
Gospodine Ministre
Mi, pravnici, predavači i umjetnici, mi smo oni građani Francuske koji su, od aprila 1992. godine ukazivali na agresiju koju je Bosna i Hercegovina trpjela i oni koji su bili uz opkoljenu prijestolnicu. Otada smo neprestano zaokupljeni povratkom mira i jačanju prava u vašoj zemlji.
Zbog toga smo ogorčeni zbog sudbine koja je danas namijenjena generalu Divjaku. Njegova hrabra i energična uloga, koju je odigrao u obrani Sarajeva, koje je bilo pod paljbom paravojnih formacija i Jugoslavenske narodne armije koja je izdala svoje ideale, je priznata u svijetu na šta su i danas ponosni stanovnici grada. Njegovo udruženje Obrazovanje Gradi BiH pomaže djeci, žrtvama rata, bez obzira na njihovo porijeklo i religiju.
Već tri mjeseca je Jovan Divjak zadržan u Austriji i ne može se vratiti u Sarajevo, zbog naloga za hapšenje Srbije, koji, međutim, Interpol ne smatra valjanim. Tužiteljstvo iz Beograda mu pripisuje, bez ikakvih dokaza, odgovornost za ubijene u Dobrovoljačkoj ulici za vrijeme dogovorenog povlačenja jedne kolone JNA, 3. maja 1992. godine. Ejup Ganić, koji je u to vrijeme bio potpredsjednik Vlade, uhapšen je u Londonu 2010. godine po istoj optužnici ali britanski sud je smatrao da je optužnica politički motivirana, da nije zasnovana ni na jednom ozbiljnom dokazu, i oslobodila ga je 27. jula .
Tada, kao ministar pravde, niste zahtijevali ekstradiciju Ejupa Ganića, bilo kao optuženog ili samo osumnjičenog. Dakle, ne razumijemo zbog čega ste sada, u ime Bosne i Hercegovine, podnijeli zahtjev za ekstradiciju Jovana Divjaka, jer ni njegova odgovornost u tim događanjima nije dokazana. Godine 2006. tužilac tužiteljstva Bosne i Hercegovine je pokrenuo istragu o slučaju Dobrovoljačka ulica. Ako ona obuhvata spisak onih koje Srbija sumnjiči, onda je na njemu devetnaest osoba, a ne samo Jovan Divjak.
Ovaj zahtjev za ekstradiciju, koji ste uputili austrijskom pravosuđu, ne samo da ide u prilog opasnim tvrdnjama vašeg kolege iz Beograda, već on znači to da bosansko sudstvo usmjerava sve svoje napora samo na jedno ime. Ova vaša inicijativa zapanjuje evropsko javno mnijenje time više što protiv Divjaka bosansko državno tužiteljstvo, koje ga je već ranije saslušalo kao svjedoka, nije ni podiglo optužnicu. S druge strane, on je jasno rekao da želi da se što prije vrati u Sarajevo, gdje bi, kao slobodan čovjek, bio spreman na svako novo saslušanje na zahtjev istražnih organa. Dakle, vaš zahtjev je neprimjeren. Osim toga, vaš zahtjev je neprikladan, jer on usporava austrijske suce da donesu odluku o neosnovanom karakteru zahtjeva srbijanskog suda za ekstradiciju.
Nadamo se da ovaj zahtjev nema neki unutarnji politički motiv i da ćete ga odmah povući. Ne usuđujemo se čak ni pomisliti da možete učiniti slučaj Divjak posebnim i da ćete pokrenuti njegovog progon zato što on ima ubjeđenja drugačija od vaših i zato što se on bori za jedinstvenu Bosnu i Hercegovinu štiteći prava i slobode njenih građana bez obzira na njihovu etničku i stranačku pripadnost.
Suočen sa dva protivnička zahtjeva Beograda i Sarajeva, austrijski sud je odlučio, 22. juna, da konsultira pravne instance obje zemlje, prije nego što odluči čiji će zahtjev prevagnuti. Ovakva procedura sa hipotetičkim rezultatom može jako produžiti zadržavanje Jovana Divjaka sve dok dvije zemlje ne razjasne svoje sporove. Gospodine Ministre, odustajući od svog zahtjeva, vi možete, vi morate, ubrzati njegov povratak. Bilo bi dakle dovoljno da austrijskopravosudje, kao što su to učinile njihove britansko 27. jula 2010. kada se radilo o gospodinu Ejupu Ganiću, proglasi zahtjev Beograda neprihvatljiv. To bi im bilo utoliko lakše, što Srbija nije u međuvremenu dostavila nijedan valjan dokaza. Svaki pametni promatrač vidi da njeno ogorčenje protiv generala Divjaka samo godi ekstremistima, pristalicama „etničkog čišćenja“ i nostalgičarima za „velikom Srbijom“, koji su teško podnijeli hapšenje Ratka Mladića.
Bosansko pravosuđe bi iz ovoga izašlo ojačano. Najprije bi vratilo slobodu Jovanu Divjaku, koji samo želi potvrditi svoju čast, vratiti se porodici, raditi u svojoj Fondaciji u interesu budućih generacija i ostati u svom gradu, koji je branio po cijenu života. Takođe bi moglo zahvaljujući njegovom iskazu kao i iskazu drugih protagonista produbiti svoju vlastitu istragu i doći do istine o događanjima u Dobrovoljačkoj ulici. I na kraju bi bosansko pravosuđe otklonilo sa sebe sumnju da se upustilo u političke igre nedostojne jedne demokratske države koja se, jednog dana, želi pridružiti Evropskoj zajednici.
Zadovoljenje pravde prema žrtvama je neophodan uvjet za izmirenje među narodima, pod uvjetom da ne bude instrument za suprotne ciljeve. Europa neće odobriti pokušaje da se prepravlja ratna historija i da se izmiruju privatni računi preko iskrivljenih pravnih procesa. Gospodine Ministre, odmah treba dati riječ pravu.
Antoine Garapon, sudija i Generalni Sekretar ’Institut des Hautes Études sur la Justice
Florence Hartmann, autor, bivši izvještač sa Balkana i bivša savjetnica Tuziteljice MKSJ i MKS za Rwandu
Louis Joinet, pravnik i bivši nezavisni pravni ekspert pri UN
Maguy Marin, koregrafkinja
Ariane Mnouchkine, pozorišna rediteljka i direktorica Théâtre du Soleil
Olivier Py, pozorišni reditelj i direktor Théâtre national de l’Odéon-Théâtre de l’Europe
François Tanguy, pozorišni reditelj, Théâtre du Radeau
Emmanuel Wallon, profesor analitičke politike na Pariskom Univerzitet
Monique Chemillier-Gendreau, profesorica Javnog Prava i političkih nauka na Pariskom Univerzitet
Jean-Louis Fournel i Pierre Bayard, profesori na Pariskom Univerzitet
Jack Ralite, bivše ministar i senator iz Seine-Saint-Denis