Cela fait des mois que la Gay Pride de Split était en cours de préparation, des mois que l'on avertissait sur les risque de troubles et d'empoignades, peu importe cela n'a pas empêché le pire. Malgré que 400 policiers aient été mobilisés.
Mais qui la police protège-t-elle donc dans ce pays ? Une minorité pacifique qui tente de se battre pour son statut dans la société ou bien une majorité agressive, exclusive, homophobe et violente, qui armée de pierres, de gaz lacrymogènes, de bouteilles et de feux de Bengale s'attaque à un cortège avec la bénédiction de l'Eglise.
La police protège les oligarques et les fascistes
En vérité il y a longtemps que la police a laissé entendre à quoi elle sert vraiment : protéger la classe au pouvoir et les oligarques sans scrupules. Elle vient désormais de montrer au service de qui d'autre encore elle se place : la majorité homophobe. Plutôt que de disperser dans un but préventif les hooligans et d'ainsi protéger les participants du cortège, elle s'est contentée de les évacuer une fois qu'ils se sont retrouvés sous un feu de barrage.
Qu'on se comprenne bien, le problème n'est pas qu'il existe une majorité intolérante. S'il n'en était ainsi, alors la Gay Pride n'aurait pas d'utilité. Le problème est que la police ne protège pas la minorité inoffensive.
Karamarko, la personne la plus puissante du gouvernement
Si Tomislav Karamarko ne s'était pas profilé ces dernières années en la personne la plus puissante dans ce gouvernement, et partant la plus dangereuse, alors peut-être y aurait-il un sens à demander sa démission pour ce qui s'est passé à Split.
Il s'agit d'un ministre qui lors des récentes manifestations pacifiques sur la Place des fleurs, lorsque la police a brutalement embarqué les manifestants dans les paniers à salade, a prévenu les citoyens que "la police ne tolérera pas leur désobéissance". A l'époque aucune conséquence ne l'a effleuré. Ce sera pareil cette fois-ci.
La Croatie n'est pas un pays normal
Dans un pays normal, en particulier lorsque les négociations d'adhésion sur l'entrée dans l'UE ont solennellement pris fin la veille, il serait normal après un tel déchaînement de violence que l'on demande la démission du ministre de la police. La Croatie n'est pas encore ce genre de pays.
Chez elle il est encore normal que lors d'une tribune publique un prêtre qualifie en toute impunité les homosexuels de malades et de personnes handicapées, que le président de la Fédération croate de football soit sanctionné par un organe international en raison de ses propos homophobes plutôt que par la justice croate, et que la police prenne le parti de ceux qui s'attaquent à un cortège pacifique.
Les gauchistes et les homosexuels dans le collimateur
Il y a une dizaine d'année il était parfaitement normal que la police permette aux groupes extrémistes d'hooligans d'assaillir les antifascistes en plein milieu de Zagreb (sur ce qui était alors la Place des grands hommes croates), d'abord à l'aide de gaz lacrymogènes puis de jets de pierres et de coups de poing.
Aujourd'hui à la place des gauchistes ce sont les homosexuels qui viennent d'être pris pour cible par les casseurs, et à nouveau la police ne fait pas tout le nécessaire afin de les protéger. Ce qui revient à ne rien faire.
C'est pourquoi la démission du ministre Karamarko ne serait pas seulement un geste politique mais surtout civilisé. Un geste pour que dans ce pays la police protège ses citoyens normaux et non pas les hooligans, les fascistes, les xénophobes et les homophobes.
Reste à savoir qui dans une société et dans un moment pareils ose encore braver une telle majorité ?
Par Tomislav Klauški
Source : index.hr, le 12 juin 2011.